Après le triomphe de De rouille et d'os, on sent que Jacques Audiard a eu carte blanche pour faire un sujet encore plus sensible, moins facile de prime abord, mais qui convoque en fin de compte les codes du film de genre qu'il affectionne tant.


Dheepan est le nom de ce Sri-lankais, obligé de fuir son pays à cause de la guerre civile. Pour avoir plus de chance d'être accepté dans un pays refuge, il va en France accompagné d'une femme et d'une jeune fille et tous vont passer pour une famille unie, jusqu'à ce que l'homme trouve un emploi dans une zone sensible. A partir de là va démarrer une autre guerre...


Ce que j'aime dans ce film, c'est que Audiard ne tend pas à politiser son message, juste à montrer des étrangers qui se trouvent au mauvais au mauvais moment. L'illusion de la famille parfaite passe aux yeux des autres, mais très vite, les disparités sociales, raciales, vont faire surface. D'ailleurs, la cité en question ne sera jamais nommée, ni aucun autre signe distinctif.
Il y a une très belle scène, révélatrice de l'état d'esprit, où la fille ne va pas supporter de voir d'autres enfants chanter des comptines en clapant des mains. Elle, qui ne connait rien des traditions locales, va voir dans ces gestes un acte de violence, et va se ruer sur les autres filles, persuadés qu'elles se battaient.
Tout le film parle du déracinement, de ce trio qui comprend à peine le français, mais qui doit vivre coute que coute, en ayant comme but l'Angleterre.


Les sentiments vont faire peu à peu place jusqu'à un début de guerre des gangs, où l'homme tamoul va reprendre les armes, dans une dernière partie qui rappelle beaucoup Taxi Driver.
Ces trois sri-lankais, incarnés par des acteurs non-professionnels, sont au bout du compte touchants, car on voit leur volonté de survivre, mais au bout du compte, la réalité qui surgit, celle du milieu où règnent les armes.
Le film est vraiment prenant, y compris dans cette fin controversée, que j'associerais presque à un songe, mais Audiard a encore réussi son coup, même si on peut regretter que cette fois, Alexandre Desplat ne compose pas la musique.

Boubakar
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le 5 août 2016

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