Diaz raconte l’histoire de policiers italiens qui tabassent et humilient sans vergogne et sans conséquences des contre-manifestants au G8 de 2001 dans une école à Genova, sous le prétexte fallacieux que cela serait un nid de black-blocs (tiens, tiens, tiens).
Même si le film ne tombe pas dans le manichéisme et dans la diatribe anti-flic, avec un personnage plus modéré, moustachu, et poussé par sa hiérarchie et ses hommes à cran à agir comme il fait, reste que le film a un parti pris évident pour les manifestants. Quelques scènes sont filmées caméra à l’épaule ce qui renforce ce sentiment d’abus de pouvoirs quand on voit ces passages à tabac de personnes qui n’ont rien fait, si ce n’est se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Une certaine familiarité morbide et lamentable se dégage donc des images et la scène principale (le passage à tabac dans l'école) est vraiment dérangeante à regarder.
Malheureusement, un parti pris du film n’est pas optimal cinématographiquement parlant ; avec la multiplication des personnages, impossible de vraiment s’attacher à l’un d’eux en particulier et toute la violence physique et morale que subisse les manifestants en est ainsi atténuée. Le film dure quasiment deux heures pourtant pas un personnage ne doit avoir plus de trente minutes de temps d’écran. Le film aurait dû s’attarder sur un personnage, comme par exemple, la jeune allemande et la suivre de bout en bout, son calvaire aurait été beaucoup plus vif pour le spectateur. Idem pour le policier plus « humain » et plus moustachu ; autant ne pas en parler et aller à fond dans le délire où l’uniforme de police devient une menace quasiment inhumaine parce que du point de vue des manifestants, c’est ce qu’elle est. Ou alors en inversant le propos et en suivant la moustache du policier de bout en bout ; Mario policier marié qui mange des bolognaises à midi et qui va tabasser des adolescents à contrecœur le soir, l’impact aurait été d’autant plus marquant.
Aussi, en se concentrant sur un personnage précis, le film aurait évité cette prolifération d’acteurs inégaux à l’instar du français black-bloc présent dans le film où chaque apparition devient synonyme de regard renfrogné et de jeu d’acteur médiocre pour des lignes de dialogues qui ne mènent finalement pas à grand-chose. Le film laisse entendre que la violence des blacks-blocs est une raison avancée pour « justifier » la violence policière aussi disproportionnée soit-elle (tiens, tiens, tiens). Pourtant, cette problématique ne va pas plus loin. L'argument qui consiste à dire que les blacks-blocs sont des idiots utiles du Capital à cause de la répression qu'ils engendrent aurait pu être creusé, contre-argumenté, rejeté ou accepté, que sais-je. Mais non ça ne va plus loin. En fait, ça ne va nul part.
Un autre problème qui casse également le propos est le montage. Déjà, certaines scènes sont montrées plusieurs fois de différents points de vue (ce qui casse un peu le rythme), d’autres encore coupent la scène pour nous montrer un autre point de vue dans une autre chronologie (ce que faisait un autre personnage avant). Or, on s’en fout de savoir ce que faisait ce type qui passe son temps au téléphone à parler aux médias pendant que l’école se fait passer à tabac. Cela n’apporte pas grand-chose et ça nous sort du point de vue que le film se voulait de défendre. Mais pire, le montage vient également cacher la violence policière. On a une scène où un type se fait violement tabasser au sol. La scène commence et dure un moment avant de couper à autre chose et de revenir sur lui peu après pour une deuxième couche. Pourquoi la caméra ne reste pas à filmer ce type au sol tout le temps que dure son passage à tabac, du début à la fin et ce sans nous montrer quelques plans d’un autre gus qui n’a rien à voir avec ça ? Faites durer les plans bon sang, c’est comme ça que le cinéma sait être marquant.
On se retrouve donc devant un film un peu inégal qui arrive d’un côté à représenter cet arbitraire avec un certain réalisme et quelques scènes dures et violentes, mais avec certains choix narratifs et cinématographiques qui font passer Diaz du brûlot antiviolence policières à un patchwork plus oubliable.