L'affiche promet (picturalement) un beau duel de beaux acteurs. Mais visiblement Dussolier a gardé quelques séquelles de ses nombreux films avec Catherine Frot, à savoir une expression figée et un jeu tout en marmonnement et regard oblique.
A vrai dire, on est fixé très vite. Quand le courant est rétabli dans le bureau du consulat, Nordling apparait de derrière un lambris et s'excuse obséquieusement de déranger le gouverneur dans ce qui est je crois la réplique la plus mal jouée qu'il m'a été donné de voir depuis les extraits vidéo de "the room".
Le film qui se déroule en suit donne vraiment l'impression de trois bouts de ficelles, que ce soient la scène sur le toit ou la scène finale rue de Rivoli, avec une reconstitution en carton pâte du vieux Paris. Le duel est déséquilibré entre le vieux militaire allemand et le consul francophile suédois. L'intérêt du film était de voir comment est-ce que le rapport de force change : c'est vraiment gros.
Le militaire a tous les arguments pour faire sauter Paris : ordre de la hiérarchie, commandement militaire, enfants pris en otage par le gouvernement du Reich.
On est globalement arnaqué sur toute la ligne. On a droit aux échanges obséquieux de deux personnes rompues aux discussions diplomatiques, aux aboiements autoritaires du militaire allemand, au congédiement-qui-n'en-est-pas-un, on a droit aussi au vieux suédois qui sauve le vieil allemand en lui donnant ses pilules (pas çaaa, pas la création d'un lien privilégié par l'aide spontanée), la tentative de chantage aux enfants (c'est moche), le "veuillez raccompagner monsieur à la porte" suivi très rapidement d'un "Attendez, ne partez pas" (Mazette, quel rebondissement dans un film de têtes chenues, pour un peu mon pacemaker s'emballerait).
Puis enfin la scène qui fait basculer le film, le diplomate qui arrive à convaincre l'autre qu'un réseau de la résistance fera passer ses enfants en douce hors d'Allemagne (Car c'est ce qui freinait von Choltitz). C'est sûr que des enfants d'un officier de la Wehrmacht caché dans une cave de paysans à côté d'enfants juifs, c'eut été truculent.
C'est le rebondissement de trop. L'écriture bâclée, l'intrigue avance de manière artificielle. On est à moitié pris par cette course contre la montre, un peu ému par cet Arestrup raide comme la justice qui parvient à suggérer le dilemme malgré son apparente fermeté. Dussollier est en revanche fade comme une côte de blette. Un film qui ne vaut que par son numéro d'acteur et encore, celui-ci est très inégal.
Une fioriture douce-amère, relevée à la fin par l'emploi de l'allegretto de la symphonie n°7 de Beethoven. Pas le meilleur Tavernier et comme on peut le lire sur la fiche, il n'est pas parvenu à faire sortir son film de la scène de théâtre.