J'aime beaucoup les réalisations de Richard Fleischer, excellent artisan à la carrière au long cours malheureusement oublié aujourd'hui (à l'exception de son célèbre thriller d'anticipation écolo Soylent Green).
Dans l'œuvre qui nous concerne, film de gangsters dépeignant la guerre qui oppose trois familles mafieuses provoquée par un consigliere ambitieux, le cinéaste réussit à imposer une qualité bien particulière, qui imprégnait déjà son précédent polar The New Centurions (qui s'intéressait quant à lui aux défenseurs de la loi).
Celle-ci se résume à un réalisme brutal et pessimiste, qui présente la profession de mafioso comme une prison dont la loyauté, la famille, et les rapports de pouvoir sont autant de barreaux, et de laquelle on ne peut s'échapper que par la mort (que celle-ci soit physique et violente, ou lente et intérieure). Ce côté rentre-dedans et sans concessions, qui se traduit également par un évitement de l'analyse psychologique pour mieux déterminer les protagonistes par leurs actes, fonctionne étonnamment bien et rappelle la fraîcheur des petites séries B noires semi-documentaires de l'âge d'or, en plus fouillé, en bien plus violent et en bien moins moralisateur.
Mais cette qualité ne pourrait pas être présente si les autres éléments composant le métrage n'étaient pas à la hauteur. Heureusement, entre un scénario carré et trépidant, jouissif jeu de massacre fait de manipulations, de trahisons et de meurtres, des personnages auxquels on se prend malgré nous à s'attacher, un Anthony Quinn magnifique en Don Angelo, de nombreuses scènes (notamment d'action) d'une efficacité rare, et une fin astucieuse et étrangement émouvante, on est gâté. Dès lors, on fera vite l'impasse sur quelques imperfections formelles et un casting inégal, et on ne boudera pas notre plaisir.
Je trouve dommage qu'il n'y ait que deux notes sur cette pellicule, elle est quand même beaucoup plus réussie que Les Affranchis (j'aime bien finir mes critiques sur une attaque gratuite).