Adam McKay n'est pas un réalisateur dont je suis particulièrement le travail. Intrigué par The Big Short que je n'ai pas encore vu, clairement attiré par Vice dont les retours critiques et le casting m'ont fait de l’œil, je ne connais pas grand chose d'autre du monsieur.
Pourtant, quand les premières bandes-annonce sont sorties (parce que oui, apparemment le Pathé helvétique diffuse du Netflix en avant-première, c'était déjà le cas avec The Power of the Dog), Don't Look Up a su exciter ma curiosité. Lawrence et Di Caprio comme point d'orgue d'un casting monumental, une comédie SF un peu délirante et critique qui ne serait pas sans rappeler une filiation avec un certain Docteur Folamour mais version changements climatiques, bah avouons-le, pourquoi pas ?
Mais qu'en est-il réellement ?
Disons-le d'emblée, Don't Look Up n'est pas toujours fin. On le voyait dans la bande-annonce, on le voit à l'écran, McKay ne fait pas dans la dentelle et ça se sent dans sa plume. Ses personnages ne sont pas les plus subtils que l'on a écrit cette année : entre un DiCaprio chercheur Asperger aux crises de paniques constantes, Lawrence en étudiante rebelle, Streep en présidente maniaque et Hill en vice-président trumpesque à souhait, il y a mieux. Le concept de base (une comète de 10 kilomètres qui s'apprête à écraser l'humanité) n'est pas ce qu'on pourrait appeler un scénario original non plus.
Et on a parfaitement conscience de ça en entrant dans la salle de ciné. Je ne m'attendais à pas grand chose d'autre qu'un Idiocracy plus vert, plus 2021 et servi par ce mastodonte de casting (dont on a encore oublié Chalamet, Ariana Grande, Blanchett, etc etc).
Pourtant, dès le début, le film sait vous emporter. Les deux heures vingt de déni cosmique défilent à vive allure, malgré quelques ventres mous inéluctables en milieu de film, sans doute portées en grande partie par un montage efficace et une bande-originale soignée. Faut dire qu'elle est dirigée par Nicholas Britell, déjà à l'oeuvre dans les derniers films de McKay mais aussi dans Moonlight et Twelve years a slave.
Et si le potentiel comique du film est indéniable, plus il avance, plus on rit jaune devant cette satire gros-sabots de notre société réfractaire au changement. Plus les personnages qui paraissaient grossièrement écrits, trimballés dans cette intrigue qui paraissait primitivement rudimentaire, sonnent justes. Et c'est à ce point de bascule - prenant chairs sur la pellicule au moment où DiCaprio pète un câble en direct à la télévision - où le film se retourne complètement. Où l'on se rend compte que ces caricatures ne sont rien d'autre qu'un miroir de notre société (salut le trumpisme, la débilocratie des réseaux sociaux, le jeu des marionnettes de la politique), que le scénario tiré par les cheveux serait, peut-être, pas si éloigné de ce qui pourrait se passer.
Et le film a une telle montée en puissance jusqu'à la scène finale dans la maison de DiCaprio - alias Dr. Mindy - qu'on ne peut rester que bouche bée devant ce film qui ne marche pas tout le temps, mais qui a l'avantage de nous secouer grave.
Alors sûrement qu'on peut rester sur le carreau, qu'on peut passer à côté, qu'on peut ne pas sentir ce point de bascule et garder qu'une comédie grasse où l'on rit, mais pas beaucoup. On pourra aussi critiquer une photo pas toujours incroyable et des effets numériques souffrant d'un budget qui serait (peut-être ?) trop passé dans le casting, servant une comédie/satire très américano-centrée. Mais putain, moi, Don't Look Up, que je ne voyais pas venir, a déboulé du tournant pour me rouler sur la gueule.
C'est un grand coup de coeur de 2021... Et c'est triste qu'il ne soit pas plus facilement visible sur grand écran car ça valait le coup !
Espérons que McKay tape aussi fort avec Bad Blood, un biopic dont on ne sait pas grand chose si ce n'est que Jennifer Lawrence sera aussi de la partie. Et à nouveau, c'est à une plateforme que McKay confiera son travail...