12 hommes en colère, c'est l'histoire d'un jeune homme accusé du meurtre de son père qui risque la peine de mort. Tout l'accuse : des preuves, des témoins... bref, le coupable idéal. Heureusement, un autre type, Henry Fonda alias Mr Davis, ou bien le juré numéro 8, doute de la culpabilité du jeune homme. Petit problème : les 11 autres jurés devant décider du sort de l'accusé restent persuadés que c'est bien lui qui a tué son père. Comment convaincre 11 personnes dans une salle non-climatisée en plein été, pressées de terminer cette corvée pour assister au match du soir, de changer d'avis, ou au moins de réfléchir aux conséquences de leur décision ?
Le Huis-Clos
Il me semblait judicieux d'aborder en premier lieu l'utilisation d'une technique cinématographique assez particulière, le huis-clos. En effet, quoi de mieux pour créer une atmosphère pleine de suspense et de tension ? Ici, Lumet a parfaitement joué son coup.
Tout d'abord, cela permet de rassembler les règles du théâtre (unité de lieu, de temps et d'action) et apporte donc une dimension originale au film. Ensuite, il permet d'expérimenter de nombreuses techniques, notamment l'utilisation d'objectifs de focales croissantes afin de donner l'impression que les décors se rapprochent de plus en plus, et ainsi accentuer l'atmosphère oppressante et étouffante que j'ai souligné précédemment. Seulement 365 plans peuvent être distingués : cela reste très peu pour un film d'1h30, ce qui a permis de réaliser 12 hommes en colère avec peu de moyen, mais beaucoup d'efficacité. De plus, le huis-clos n'est pas utilisé tout au long du film : au début et à la fin, nous assistons à diverses scènes, toujours en rapport avec le lieu du jugement. La dernière scène notamment, lorsque tous les personnages sortent du bâtiment, permet de "détendre l'atmosphère" qui régnait jusqu'à présent.
Personnalités
Au fur et à mesure de ce huis-clos, nous en apprenons de plus en plus sur l'affaire, et ce grâce aux dialogues entre les 12 jurés présents dans la pièce, d'ailleurs très bien aménagée pour un huis-clos (éléments importants comme le ventilateur, les fenêtres, la grande table, les toilettes etc...) . Des dialogues nous pouvons en ressortir la personnalité de chacun des personnages, qui s'affirment tout au long du film : le versatile, le borné, l'influençable, l'indifférent, le suiveur, et puis le sage. Ce dernier, interprété par Henry Fonda, incarne ainsi un personnage qui semble au dessus de tous les autres : plus intelligent, plus calme, plus déterminé, etc... Le réalisateur, par ce jeu de personnalité, réussit très bien à valoriser Fonda, et donc son opinion.
Justice américaine
Grâce à la création de ce microcosme social, qui réunit donc 12 personnes avec des personnalités variées, un environnement oppressant, et une porte fermée à clé, Lumet dénonce ici avec froideur le système judiciaire américain : ses dérives, ses faiblesses, etc...
Au delà donc d'une "expérimentation" du huis-clos et autres techniques cinématographiques, une véritable critique engagée découle du film. Quel est l'intérêt de faire intervenir 12 personnes sensées faire une décision de justice relevant d'une peine de mort si un homme aux talents persuasifs peut réussir à gagner la confiance de 11 personnes en seulement quelque(s) heure(s) ?
Verdict
Voilà donc un chef-d'oeuvre signé Sidney Lumet qui apporte un vent nouveau au cinéma, avec des acteurs sans erreur, et une réalisation millimétrée.