Parmi les multiples versions de l'oeuvre de Stevenson, celle-ci à le mérite de surprendre agréablement son spectateur...
Réalisé en 1931, le film de Mamoulian déborde d'innovations en tous genres qui rend la vision de l'oeuvre particulièrement fascinante... Entre des passages entre deux scènes qui se rapprochent curieusement du split-screen, un début tout en caméra subjective, quelques gros plans monstrueux et autres joyeusetés du meilleur aloi, le spectateur est littéralement emporté dans les aventures de cet homme qui défie Dieu avec une virulence peu commune.
Dans le rôle, Fredric March est absolument parfait, il va jusqu'à être bouleversant lorsqu'il avoue sur la fin son état terrifiant de damné encore vivant. Le Mr Hyde du film est une part avant tout animale et particulièrement portée sur l'aspect libidineux des choses. Ce monstre néandertalien s'offre quelques très bonnes scènes, mais j'ai finalement regretté que cet aspect soit le seul retenu dans le film... Je veux bien que l'Angleterre victorienne créé des frustrés, je veux bien que les jolies jambes de Miriam Hopkins émoustillent n'importe qui, surtout dans une période pré-Code Hays, mais pour mettre Fredric March dans cet état, il me faudrait autre chose que Rose Hobart... Je veux bien qu'on transforme toute l'histoire sur le point de vue sexuel, que l'on bestialise Hyde au plus profond, mais tout de même pour que les symboles les plus évidents de la société castratrice poussent Jeckyll au désespoir en lui refusant le coït tant désiré (et avec ça qu'il pouvait pas se pignoler, ce couillon là...), il faut tout de même que le fruit de son désir soit un peu plus crédible que cela...
Cela étant, le film demeure tout à fait intriguant, March y gagnera le premier de ses oscars et Miriam y compose un rôle véritablement terrifiant.
On remarquera aussi tout particulièrement le soin apporté ici aux décors qui composent un Londres de beaucoup de charme. Entre le petit pont menant à la porte principale, la bibliothèque, le laboratoire, le jardin de la fiancée, les appartements de la pauvre Hopkins, tout cela rajoute au film un cachet ravissant qui n'est pas pour rien dans la réussite finale de l'oeuvre.