Des fois, le cinéphile est comme le charognard. Il se délecte et se fait une joie de détruire une idole qu’il avait aimée par le passé. Il va l’encenser un jour et la détruire un autre. Il va limite la vénérer et ensuite ne pas lui pardonner un faux pas.
Parfois, il peut pardonner ! Parce que même si c’est un ratage, ce ratage va servir quand-même d’exutoire. Et donc, cela sera acceptable pour lui. Oh, merci film, tu me consoles d’être ce que je suis. Tu me rends acceptable. J’ai conscience de ta maladresse ! Mais je te pardonne parce que tes intentions sont louables. J’ai réussi à voir en toi le message que tu portes. Limite, je suis le seul à le voir et cela fait notre relation encore quelque chose de plus intime. Tu es mon petit plaisir coupable que je chéris...
C’est le cas de Dracula 3D. Je pense que le mauvais accueil du film est peut-être réellement significatif. Peut-être que le film est objectivement mauvais. En général, la qualité d’un film m’importe peu tant que j’y trouve de quoi me nourrir et que j’apprécie au final. Comme beaucoup de personnes et de cinéphiles surtout.
Ce qui est raté, apparemment, avec Dracula 3D c’est que le film se veut très violent et brutal alors qu’il dégage quelque chose de ridicule au final. Il n’a pas le coté flamboyant et baroque des premiers Argento. Il est très simple. C’était voulu. Argento est ce genre de réalisateur qui aime changer de style à chaque film. En prenant presque opposition avec le style du précédent film, ou parfois aussi, en poussant le style encore plus loin (comme le duo Suspiria - Inferno). Donc, finalement, Dracula 3D peut se comprendre. Il voulait un retour au cinéma primal. À l’essence même du cinéma. Quelque chose de frontal. Son Dracula est très primaire ! Il est à la fois asexué et en même temps porte en lui toutes les sexualités et déviances possibles. Il n’use pas de subterfuges et n’est presque pas manipulateur ! Ou manipulateur par la force. Oubliez aussi le coté séducteur. Il ne fournit aucun effort de ce côté-là.
L’aspect global du film peut paraitre régressif. Comme si Dario était fatigué - et peut-être blasé ? - et ne fournissait que le strict minimum. À mon avis, il a conscience de cela et en joue. Il fait du minimalisme assez sale et s’en contente. Je trouve personnellement que c’est mieux que rien. Pour certains, il aurait dû s’arrêter avant. Moi j’ai vraiment apprécié Dracula 3D et même Mother of Tears. Si Dracula 3D est son dernier film, il termine sa carrière de réalisateur de la meilleure des façons.