Libre adaptation du roman Paris Vampire, rédigé par Claude Klotz, Dracula Père Et Fils est une invraisemblable comédie bis française.
Réalisée en 1976 par Édouard Molinaro et mettant en scène le classieux Christopher Lee face au lunaire Bernard Menez, respectivement père et fils et empêtrés dans un triangle amoureux, l’œuvre fut mise en branle par le producteur Alain Poiré. Ce dernier ayant été conquis par le succès public d'une autre parodie vampirique, toujours avec Bernard Menez mais cette fois-ci face à Peter Cushing, intitulée La Grande Trouille, Poiré charge son fils Jean-Marie (futur réalisateur du Père Noël Est Une Ordure et des Visiteurs) de coadapter le roman de Klotz en secondant le scénariste Alain Godard. Molinaro ,viendra finalement prêter main forte au duo pour finaliser le script lorsqu'il se verra engagé en tant que réalisateur.
Nous sommes en Transylvanie en 1784. Pour étancher sa soif de sang, un Comte roumain (Christopher Lee), vampire de son état et plus communément craint sous le sobriquet de "Prince des Ténèbres", fait kidnapper la jolie et douce Herminie Poitevin (Catherine Breillat) avant de succomber à son charme. Un enfant, Ferdinand (Bernard Menez), naitra de leur union, mais le bonheur familial sera malheureusement écourté, terni par le tragique décès de la jeune femme. 192 ans plus tard, le régime communiste bolchévique perquisitionne le château du Comte immortel. Ce dernier se voit contraint de fuir son pays en compagnie de Ferdinand qui a hérité de la douce personnalité de sa mère. Suite à plusieurs quiproquos, le père et le fils sont séparés et se perdent de vue durant de longues années. Le premier devient finalement une vedette du cinéma d'épouvante britannique tandis que le second est un simple veilleur de nuit sur Paris. Le destin les réunira à nouveau mais sera considérablement troublé par leur rencontre avec Nicole (Marie-Hélène Breillat), responsable marketing pour une marque de dentifrice et ressemblant comme deux gouttes d'eau à Herminie...
Au-delà de la pure comédie parodique, Molinaro a avant tout voulu réaliser une pertinente chronique sociale où s'entremêle un inévitable conflit œdipien. En l'état, le personnage campé par Bernard Menez démontre la difficulté et les humiliations que pouvait alors subir un travailleur immigré au cœur des années 1970 en France. Drapant régulièrement son sujet de contestations politiques (communisme, racisme, condition de vie des immigrés, chômage, etc.) le cinéaste écarte de nombreuses fois le métrage de son délire loufoque et propose ainsi une œuvre souvent bancale, certes, mais néanmoins sympathique.
Par ailleurs, ce film fût le dernier où Christopher Lee incarna un vampire. Floué par le producteur et la Gaumont, qui lui avaient proposé une parodie dans le ton du Bal Des Vampires, le célèbre acteur britannique eut la mauvaise surprise de constater que l'utilisation du personnage de Dracula, rôle qu'il avait immortalisé pour le compte de la Hammer, servit ainsi à la promotion de l'œuvre, bien que le nom du célèbre vampire créé par Bram Stoker n'y soit jamais prononcé. Un choix commercial vraisemblablement judicieux, malgré la déception de Lee qui refusait alors de rendosser le rôle du Comte, car le film fit un triomphe public lors de sa sortie en septembre 1976.
Outre la présence des sœurs Breillat, quelques prestigieuses figures de l'époque apparaissent tout au long du métrage. Gérard Jugnot, Jean-Claude Dauphin, Raymond Bussières, Marthe Villalonga ou encore la fabuleuse Louise Dhour dans le rôle d'une prostituée haute en couleur finissent par envoûter les spectateurs face à cette farce incontestablement inégale mais néanmoins saupoudrée de pertinents message politiques et sociaux.