Première réalisation d'Abel Ferrara (hors porno, le coquinou) Driller Killer raconte la descente aux enfers d'un artiste, incarné sous pseudonyme par le réalisateur, qui finira par tuer des sans-abris à coup de perceuse.
Si le pitch laisse penser que le film est un slasher bête et méchant la réalité est en fait tout autre. Driller Killer lorgne davantage du côté de Taxi Driver ou de Panique à Needle Park et montre le New-York en putréfaction d'avant la gentrification, personnage à part entière, qui broie les corps et détruit les Hommes. La ville est ici un enfer délabré, rongé par la came et la violence, hanté par des hordes de sans-abris en haillons pris sur le vif, à même la rue. Sans-abris que le "héros" s'emploiera à tuer dans ces accès de fureur comme si la vision de plus pauvre que lui le renvoyait à sa future condition.
Au-delà de son approche naturaliste et de scènes captées sans autorisation dans les rues, à l'arrache, on retrouve les obsessions de Ferrara à commencer par le christianisme. Le film démarre par une scène hallucinante dans une église et se termine par une crucifixion. qui augure le rapport ambigüe du réalisateur avec sa foi qui trouvera son paroxysme avec son Bad Lieutenant.
Excès en tout genre, rock qui tâche, drogues dures, acteurs parfois approximatifs à cause des substances, le film est un triple portrait. Le portrait d'une ville abandonnée, cloaque de béton. Le portrait d'une génération, queue de comète du Sex, drugs & rock'n roll en pleine auto-destruction et aussi l'autoportrait de Ferrara en artiste maudit, prisonnier de ses démons.
Un hurlement dans la nuit.
Stupéfiant.