Cours, roule ou crève - Critique de 'Drive'
Il y a des fois où l'on se fait bousculer en regardant un film. Aujourd'hui, je viens de prendre une bonne claque. Alors que N.W.Refn va présenter son nouveau au Festival de Cannes, je me prépare en regardant son premier grand chef-d'oeuvre, le très contesté "Drive". Avant que je ne le vois, beaucoup m'ont signalé qu'il était d'un ennui mortel, sans intérêt, rien de spécial. Une fois le film vu, je pense pouvoir affirmer que ces personnes ont de la m*rde -excusez le terme- dans les yeux et dans les oreilles.
Comment ne pas apprécier ce silence? Ce film n'est que beauté, esthétisme et intériorité. Chaque plan est un tableau. Ou, je dirais même, plusieurs tableaux en un. Il suffit de s'arrêter à n'importe quel moment pour tomber sur une esquisse digne d'Hopper ou des photographies de Doisneau. Cette beauté qui nous semble naturelle mais qui n'est que le fruit d'une mise en scène charmeuse. Il est évident qu'il y a un énorme travail sous-jacent, ne serait que dans le placement des personnages dans leur couleur attitrée.
Je ne comprends pas comment les personnes qui n'ont pas aimé ce film ont pu passer à côté de la beauté de l'image. L'excuse principale de cette animosité revient au fait que les dialogues sont rares et longs. Mais pourquoi n'en serait-il pas ainsi, alors qu'on sent très bien que le personnage principal n'est pas dans le même monde que nous. Sa vie n'est que temps et solitude. "La solitude : douce absence des regards", il s'agit de l'histoire d'un homme seul qui découvre à son grand regret qu'il n'est fait que pour la solitude.
La musique est aussi douce à mes oreilles que sont les échanges de regards des protagonistes à mes yeux. Il n'y a aucun bruit futile dans ce film, seulement une musique languissante et entêtante. Évidemment, la bande son de Cliff Martinez donne toute sa force au rêve. Le titre "Nightcall" de Kavinsky garde ma préférence néanmoins.
Je conseille ce film à tous les cinéphiles qui n'ont, comme moi, pas pu le voir avant. Un moment de pur rêve, ni trop court ni trop long, qui donne des étoiles pleins les yeux et pleins les oreilles.