Duel au soleil
6.9
Duel au soleil

Film de King Vidor (1946)

Franche bonne partie de rigolade avec un western guimauve, hystérique, rococo, tournant kaléïdoscope rouge-orange-vert.

Les teintes d'abord crachent leurs flammes orangées. Quelques lueurs de bleu et de vert viennent lécher de leurs langues râpeuses les images volontiers sombres. Mais c'est évidemment le rouge sanguinolent qui dominent en signe d'apothéose extatique. La scène où le vieillard se retrouve seul et réalise à quel point il a été un gros con est la plus rougeoyante illustration de cet abus de filtres couleur braillards. Un cri écarlate. Un flot d'hémoglobine. La caméra vomit rouge. Et le shérif de dire "le ciel a une drôle de lueur ce soir". Rires.

Si ce n'était qu'une histoire d'images dégoulinantes... la mise en scène, la direction d'acteurs est à pleurer. Il faut voir Jennifer Jones se contorsionner, rouler des yeux en se prenant la tête à deux mains, ondulant de la croupe, se cambrant dans d'étranges convulsions, ces gesticulations pseudo-érotiques censées signifier la rage amoureuse et la frustration : une sorte de danse dénaturée pour faire le kiki tout dur à Selznique surtout, producteur et époux de Jones à la vie (au vit turgescent à la vie comme à l'image donc). Plus on y songe et plus on a l'impression de voir un film par et pour la zigounette de Selznick. Tout le parcours de Pearl, personnage joué par Jennifer Jones (superbe femme, à la voix garçonne par moments, mais au jeu médiocre ici, boursouflé par les effets, oeillades grossières et autres crispations énervées et énervantes) fait penser à une sorte de Passion christico-érotique (elle finit par le grimper son golgotha d'ailleurs) où l'oeil de Selznick s'évertue à produire une scène masochiste (la relation Jones/Peck est totalement de cette orientation).
Il ne faut pas manquer l'agonie hilarante de Lilian Gish, superbe bijou kitsch et d'une pompe suprême.

Ce qui dérange le plus c'est certainement les allers et retours sentimentaux, ces tergiversations incessantes, ces contradictions, ces excès continus et la franche bêtise d'à peu près tous les personnages (même Cotten qui hérite d'un personnage plus posé et réfléchi en apparence finit par se faire tirer comme un lapin dans une trouble hésitation entre détermination de façade et molle passivité face aux évènements).

En somme, le film est une lente, longue et pénible ascension vers des sommets de connerie. A prendre avec le sourire. Une sorte de western nanar dans son genre.

Pour être honnête, quelques plans viennent ici et là rappeller que derrière la caméra il y a du monde tout de même. Les cadrages sont parfois très beaux. Perles de pluie dans un pays où il ne pleut pas en quelque sorte.
Alligator
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le 31 janv. 2013

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Alligator

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