D’aucuns sur les réseaux après le visionnage de « Dune -Deuxième partie » crient au génie et d’autres à l’arnaque. De fait que ce soit face aux dithyrambes ou aux quolibets il faut prendre un peu de recul et savoir quelque peu doser. « Dune » est largement au-dessus du tout-venant du cinéma de blockbuster américain sans toutefois être le chef d’œuvre annoncé par certains.
Sans défaut le film ne l’est pas. Loin de là. D’emblée la musique pachydermique de Hans Zimmer envahit la salle et n’aura de cesse de surligner ce qu’il se passe à l’écran. Ceci dit ce défaut me semble inhérent à quasi tous les blockbusters américains. C’était un de mes (très nombreux) griefs sur « Avatar 2 ». Pour continuer dans les défauts esthétiques du film la représentation des Harkonnens en nazis albinos manque clairement d’originalité même si l’utilisation d’éléments d’architecture brutaliste rattrapent un peu le tout. Cette tendance de la représentation des méchants de science-fiction en reprenant l’esthétique nazi à le don de m’agacer de film en film.
Cependant le film trouve son ancrage justement dans une esthétique qui passe d’abord par une photographie qui sublime les grains de sable d’Arrakis et les rend immédiatement palpable. De fait, Villeneuve malgré son goût du gigantisme, s’intéresse tout de même à des éléments de réel qui passe par le bruit et le mouvement du sable, une direction artistique sur les accessoires et décors fremens de haute volée. Direction artistique qui a pour effet de rendre palpable cet univers même si on peut regretter là aussi que la dureté de la planète des sables ne s’incarne pas davantage dans des corps qui restent trop proprets.
Là où le film gagne pour moi ses galons en parvenant à s’extraire du simple beau livre d’images qu’était le premier en faisant un choix d’adaptation qui change radicalement le personnage de Chani tout en poursuivant la réflexion autour du récit messianique portée par l’œuvre de Herbert. Comme Herbert Villeneuve diffère la promesse du récit guerrier en montrant un Paul voulant échapper à un destin de prophète. Le film met au centre de son intrigue la foi et les affrontements théologiques internes entre les sceptiques et les fondamentalistes. Le personnage de Chani dépasse ainsi son seul rôle de femme amoureuse du prophète chez Herbert pour devenir, par-delà la béatitude prophétique des uns et le froid calcul de l’ordre de Jessica, mère de Paul, Bene Gesserit froide et calculatrice à la recherche d’une vengeance. Villeneuve effectue ici le choix plutôt étonnant de ne pas faire triompher l’amour entre Paul et Chani pour mieux la placer en contrepoint lucide. La seul voix humaine dans un monde totalement déshumanisé.
La trajectoire de Paul peut alors suivre sa ligne tragique au milieu des complots et des intrigues, manipuler la foi des uns pour mieux asservir les autres il est de toutes façons déposséder de tout ce qui faisait de lui un humain. L'héroïsme désenchanté atteint son paroxysme, fascine autant qu’il effraie, reflet de d'une humanité qui cherche dans une foi brouillée un espoir factice mais nécessaire.
Un film imparfait certes mais au-dessus du tout-venant du blockbuster.