Jamais on n'aurait cru avoir envie de voir un long-métrage appelé Dunkerque... Et c'est pourtant ce à quoi s'est intéressé Christopher Nolan qui, à la surprise générale, s'aventurait pour la première fois sur le terrain du film de guerre. Au-delà de nos attentes les plus folles et à l'instar de Terrence Malick ou Steven Spielberg en leur temps, celui à qui on ne refuse plus rien à Hollywood (pas même un budget colossal de 150 millions de dollars) signe un nouveau mètre étalon du genre, qu'il teinte de ses obsessions favorites.


De Memento à Inception, Christopher Nolan n'a cessé d’expérimenter notre perception du temps, jusqu'à le rendre malléable dans Interstellar, par le biais de montages parallèles et autres trouvailles narratives qui ont fait le succès de ces œuvres cultes. En reconstituant l'opération Dynamo de mai 1940, consistant à rapatrier 400 000 soldats anglais encerclés par la Wehrmacht, le cinéaste trouve en cet épisode de la seconde guerre mondiale un espace-temps idéal pour y plaquer ses tics formels, servant une atmosphère inouïe de course contre la montre.


Avec un récit beaucoup plus épuré qu'à son habitude, mais toujours très conceptuel dans sa structure, Nolan alterne ainsi entre plusieurs temporalités : une semaine sur terre, une journée en mer et une heure dans les airs. Un dispositif où, désormais, ses célèbres bavardages complexes laissent entièrement place au silence pesant des acteurs (excellents Fionn Whitehead, Harry Styles, Kenneth Branagh, Mark Rylance, Tom Hardy et Cillian Murphy) et à la force du langage cinématographique.


Aidée d'une musique ahurissante d'Hans Zimmer (dont l'omniprésent tic-tac souligne cette dimension d'urgence), une mise en scène incroyablement immersive nous inclue d'emblée aux côtés de ces jeunes militaires envoyés à la mort. Certains regretteront un manque d’approfondissement des personnages, mais a-t-on réellement besoin d'une biographie de ces hommes qui ne se connaissent pas et qui devront apprendre à s'entre-aider pour survivre ? Au final la puissance d'immersion est telle que le personnage le plus important de cette histoire, c'est le spectateur ! Nolan oblige, tout cela est en plus reconstitué avec un soucis d'authenticité qui force l'admiration : des centaines de figurants, une absence totale d'effets spéciaux numériques et une certaine minutie des décors (même si quelques anachronismes architecturaux n'ont pas échappé au nordiste que je suis).


Toute proportion gardée, il semblerait que, par son économie narrative et son langage purement visuel, Dunkerque puisse être un des premiers blockbusters post-Mad Max: Fury Road, un tour de force sensoriel d'une intensité permanente, qui s'affirme comme l'une des œuvres les plus abouties de son auteur et, tout simplement, comme l'une des plus impressionnantes propositions filmiques de l'année.


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le 24 juil. 2017

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