Réappropriation du traumatisme guerrier d'une opération militaire dont le déroulement cauchemardesque aura permis à la Grande Bretagne d'échapper à une débâcle violente sur le territoire français, Dunkerque est le 10° film de Christopher Nolan et sa première incursion dans le genre du film de guerre.
À défaut d'être subtil, la volonté permanente de Nolan à proposer du grandiose semble trouver son écho dans ce genre, son cinéma de prédilection mettant en scène des individus broyés par des systèmes complexes qui les dépassent.
Mon intérêt et mon attrait initial pour Dunkerque ne résident pas tant dans le sens du spectacle ni de mon appréciation de son parti pris toujours très froid et réaliste, mais plutôt dans son ambition de proposer un film de guerre dont les mécaniques ne reposent ni sur l'identification ni l'empathie.
En réduisant ses personnages à leur plus simple fonction (et quelques maigres lignes de dialogue), sans autre développement de leur personnalité que leur caractérisation progressive par leurs actions, Nolan s'est engagé dans une voie singulière que beaucoup taxeront sans doute d'impasse cinématographique.
Néanmoins, happé dans une véritable avalanche de péripéties et plongé dans un état de stress permanent, le spectateur ne tarde pourtant pas à s'immerger, malgré l'absence de cette connexion pourtant fondamentale.
Si j'ai apprécié Dunkerque, c'est parce que le concept est porté par la forme, presque irréprochable. La réalisation, associée au montage et la bande son remarquable de Zimmer, produit une fresque tragique impressionnante au rythme insoutenable. Certains plans sont vraiment splendides, la photo étant rarement prise à défaut. Ma préférence revient surtout aux instants les plus cauchemardesques où la caméra plonge littéralement dans la confusion, la panique et le désespoir de ces centaines de pantins du destin.
Mais quitte à rendre un film si viscéral, pourquoi le priver paradoxalement de... viscères ? C'est ici mon premier reproche au film.
On devine aisément la volonté de Warner de rendre son blockbuster de l'été le plus "familial" possible, mais cette décision coûte au film un soupçon d'horreur vraiment dommageable.
Autre contrariété concernant la structure narrative du film, globalement trop complexifiée pour ce qu'elle a à raconter. Il ne s'agit pas tant de déplorer cette décision de faire revivre au spectateur la même scène avec différents points de vue, mais plutôt l'impact direct qu'elle peut avoir dans le désamorçage d'une situation de tension extrême.
Passés ces deux points noirs et contre toute attente, j'avoue avoir apprécié le film et le message que j'y ai perçu, loin d'un héroïsme et d'un patriotisme dégoulinant. N'étant pas un historien et encore moins un spécialiste des conflits armés, je ne suis pas à même de déceler les éventuels raccourcis et autre facilités scénaristiques : les soldats français sont peu présents mais leur importance dans l'opération n'est pas camouflée et les lâches sont en définitive plus anglais que français.