Je suis embêtée pour noter ce film (noter une oeuvre en général n'est déjà pas facile, mais là encore moins). D'un film historique j'attends toujours une certaine précision factuelle, même si des aspects fictionnels peuvent apparaître dans les "creux" laissés par l'Histoire. Ici, l'aspect qui me gêne le plus est l'absence quasi totale dans le film de l'armée française : Nolan ne la montre que vaguement au début dans les rues de Dunkerque, à un court moment quand les Anglais refusent de faire monter sur leur navire un groupe de soldats français, et il y a ce personnage de soldat mutique dont on ne découvre la nationalité française qu'à la fin qui se fait globalement chahuter par les Anglais. De tout cela découle le sentiment que cette bataille est un événement patriotique anglais : une mobilisation héroïque de tout le pays pour sauver des soldats non moins héroïques. Mais le film met totalement de côté le coeur même de cette bataille : le fait que l'armée française, du fait du repli anglais, s'est retrouvée en sévère infériorité numérique à l'arrière pour défendre le périmètre autour de Dunkerque et empêcher les Allemands d'avancer. L'armée anglaise n'aurait jamais pu rentrer au pays sans le courage des Français restés en arrière pour protéger leurs alliés. Le film me paraît donc être surtout une vision très anglaise de la bataille de Dunkerque, et assez fausse de cet événement.
C'est un aspect qui m'a gênée, mais en même temps rien n'empêche un réalisateur de montrer le regard qu'a porté telle nation sur tel événement (la presse anglaise à l'époque n'en pouvait plus de ce "miracle de Dunkerque", alors qu'il n'y a pas de miracle quand on est protégé à l'arrière par les Français...) ; je crois que pour moi, soit on fait un film documentaire historique précis, soit, si on veut y ajouter de la fiction, on s'abstient tout de même de montrer les choses de façon tronquée sinon ça a tendance à m'énerver.
Pour le reste je ne peux pas dire que j'ai passé un mauvais moment devant ce film : contrairement à d'autres, j'ai trouvé que la musique d'Hans Zimmer créait une réelle oppression qui collait bien au sujet : imaginez un peu être encerclés par des centaines de milliers de nazis, sur terre, en mer avec leurs sous-marins, en l'air, qui avancent vers vous pour vous buter. A ce moment là de la guerre, les soldats étaient éreintés en plus : la Blitzkrieg avait fait des ravages et je n'ose même pas imaginer l'état mental des soldats cernés comme des rats dans ce petit coin de France. Le film sur cet aspect est bon : on ne ressent aucun répit, des bombardements qui ne s'arrêtent jamais, le bruit assourdissant permanent, la mort juste à côté, un sentiment de claustrophobie intense.
Pas le meilleur Nolan, pas le meilleur film du genre, mais je dirais à voir tout de même (peut-être pas à revoir en revanche).