Cela fait neuf ans que Christopher Nolan compose avec des anti-héros, des traumatismes, la manipulation du réel, l'explosion de la ligne temporelle, alors Dunkerque semblait marquer l'occasion d'innover, d'explorer de nouvelles pistes, ou alors de renouer avec la simplicité qui faisait le sel d'Insomnia... Pari tenu ? Pas vraiment. Car en dépit de ses efforts, notre réalisateur fétiche n'a pu s'empêcher de complexifier inutilement le tout au moyen d'une narration éclatée. Une trame se déroule en une semaine, une autre en une journée, une dernière en une heure. Impossible donc de se poser dans la peau d'un soldat tant l'on change continuellement de point de vue. Une telle décision n'a pu être guidé que par un désir de n'omettre aucun détail, et d'éviter l'ennui. C'est pourtant l'effet inverse qui se produit, à la manière de Memento, il s'installe une routine : mer / terre / air / mer / terre / air / mer / ... Routine, accentué par un fond musical omniprésent. Il se révèle très efficace lors des scènes de tension, mais le film aurait mérité à proposer des moments de calme. Les scènes de tension, parlons-en, constitue l'essence même de Dunkerque tant elles sont brillamment orchestrées par l'oeil toujours plus habile de Christopher Nolan, la photographie âpre de Hoyte Van Hoytema, ainsi que la musique à la dynamique inarrêtable de Hans Zimmer. La routine mise à part, le film se révèle bel et bien être le "cinéma d'expérience" promis, grâce à une distribution des scènes qui fait que l'ennui n'est qu'éphémère, tant l'intérêt du spectateur remonte régulièrement. Néanmoins, Dunkerque n'amorce a priori aucune piste susceptible d'être explorée par le cinéaste à l'avenir, comme s'il ne s'agissait au final que d'une parenthèse de sa filmographie, un coup d'épée dans l'eau en somme.