"Dupont-lajoie" est une expression oubliée qui désigne le Français moyen, voire caricatural. C'est aussi le meilleur titre que ce film-choc pouvait avoir car il met justement en scène une pléiade de ces "dupont-lajoie". En plus de nommer Lajoie le principal d'entre eux.
Ces "bons français" sont rassemblés dans une ambiance qui commence dans un registre comique un tantinet satirique mais globalement inoffensif. Et pourtant... Dès la scène d'introduction, des signes discrets et a priori anodins annoncent les drames à venir : racisme primaire, bêtise, hypocrisie, préjugés faciles... Quiconque n'a jamais vu le film ni pris connaissance de ce qui s'y déroule (ni lu cette critique ^^) n'y verra que du feu tant ces signes sont l'exacte représentation d'un quotidien humain que l'on connait tous.
Mais si le film a fait un tel scandale à sa sortie (1975), c'est qu'il prend à sa moitié un tournant particulièrement dérangeant. Revirement accentué par le réalisme des personnages et de l'enchaînement cruel des situations qui donnent à l'ensemble l'allure d'un fait divers à effet boule de neige foncièrement dégueulasse.
Parmi les grandes réussites de ce film, citons tout d'abord la création d'une galerie de personnages brillants car à la fois caricatures poussées et êtres humains entièrement crédibles et réalistes. Ces derniers étant incarnés par d'illustres comédiens : Jean Carmet en immonde salopard sans remord, Pierre Tornade en bon vivant truculent, Jean-Pierre Marielle en présentateur TV ridiculement imbu de lui-même, Victor Lanoux en brute raciste... Tous servent magistralement un film d'une crédibilité sans faille et dont les résonnances en deviennent terrifiantes. Et nous laissent bien dépités quand à notre condition de Français, et même d'êtres humains.
Un film qui semble hélas voué à un oubli injuste alors qu'il est presque quarante ans après toujours terriblement d'actualité.