Eat the night est un film qui réussit le pari de la modernité. Parlant d'une France sans lumière pour les jeunes en situant son action au Havre, le duo de cinéastes reprend le format classique du film de deal, avant de faire graviter autour des récits satellites qui ont tous pour thème la connexion : le lien frère-soeur ; le jeu vidéo en ligne qui unit une communauté de joueurs et de joueuses ; la relation amoureuse homosexuelle. Pour chacun de ces thèmes, le récit arrive à être fort et à dégager des émotions sincères, en partie dûes au jeu des trois protagonistes, et à des trouvailles de réalisation. La réussite du film tient aussi dans la connexion entre ces récits, connexion qui fait déborder le film de générosité et de trop-plein que l'on pardonne vite.
Le jeu vidéo Darknoon créé pour le film, dont on annonce la fin du serveur au solstice d'hiver, se mêle au jeu de la vie jusqu'à ne faire qu'un univers, entre errance, rencontres et violence. Certes, le schéma classique du film de deal, fil rouge d'Eat the night, est prévisible, mais les trois récits satellites surprennent et créent une attente donnant lieu à des scènes remarquables, aussi bien esthétiquement qu'émotionnellement (et ça, c'est tout ce qu'on attend d'un film de ce genre, sans genre).
A côté du très réussi Chien de la casse de l'an dernier (au titre geek), Eat the night propose une autre vision cyber, de cette Gen Z évoluant sans cesse entre déconnexions et connexions, baignant dans un surplus de sentiments et de galères peut-être un peu trop dur à gérer tout seuls pour devenir des adultes comme leurs parents. Il faudra être différent et faire autrement.