La France profonde, la France périphérique, la France Gilet Jaune. C'est encore là que Delépine et Kervern (D&K) nous plongent. À une situation grave voire impossible à démêler, ils opposent un scénario et des personnages presque légers, malgré le sentiment de vide intérieur et la profonde tristesse qui les traversent.
"On est là, on est là"
Tout en étant impuissants face à un système plus fort qu'eux, leurs personnages réagissent avec une candeur qui revitalise le spectateur. Nos auteurs grolandais finissent toujours par faire renaître les âmes perdues ou fracturées, et l'envie de mieux et de sens se fait grâce au collectif, même s'il est constitué d'êtres instables. Nous sommes ainsi toujours ainsi d'une infinie sympathie à leur égard.
Montrant des visages rarement filmés dans le cinéma français, ainsi que dans des lieux où l'on ne pose que trop peu souvent la caméra, D&K insufflent de la vie là où elle semble disparaître, là où les liens sociaux subsistent tant bien que mal dans cette société française désormais mondialisée.
La France contre les robots
À la manière de David contre Goliath, le courage suicidaire et la ténacité ingénue de ces quidams face à ces ogres que sont les GAFA, le numérique, les data centers et autres IAs, met du baume au cœur. Même si D&K ne sont jamais dupes sur le sort de cette France et de ses petites gens, ils leurs montrent des voies possibles : une simplicité retrouvée, des amitiés à retisser, la sensation de "village" à recréer.
Ainsi, des instants de poésie simples parsèment le récit et finissent par nous toucher, se mêlant à un humour allant du noir au bon-enfant, en passant par le loufoque.
Semblable à un épisode de l'émission Strip-Tease, "Effacer l'historique" est de ces fictions si absurdes qu'elles ressemblent curieusement au réel.