Après le remarquable mais très démonstratif premier volet, Johnnie To prend une toute autre direction avec cette suite directe. Comme s’il prenait le temps de disséquer de manière élégiaque la représentation d’une organisation maffieuse régit par des financiers drapés d’élégance, To pare sa mise en scène d’une aura dramatique teintée de virtuosité.
Election 2, n’ayons pas peur de le dire, rentre sans complexe dans la cour des grands du film de gangster. Quand son premier volet s’anoblissait de par sa maitrise formelle et son sens du rythme, cette suite est habitée par une sorte de lyrisme funèbre donnant à ses personnages une gravité Melvilienne. L’élève labellise sa référence et s’émancipe fièrement, se drapant alors du statut de grand réalisateur, peut-être même le plus beau représentant contemporain…, du polar maffieux.
La direction d’acteurs ne fait cette fois absolument plus de doute, jamais le « branché » beau gosse Louis Koo n’aura été aussi crédible. Pour le reste du casting, on retrouve le gratin de la ménagerie Toienne, dont un Simon Yam une nouvelle fois remarquable dans ce rôle de leader en sursis sur la pente vertigineuse de la déchéance. Car dans ce milieu, la course effrénée et fastidieuse pour arriver au pouvoir, s’avère vaine et de courte durée. On y meure jeune, ou on y périt dans une lamentable et pathétique chute d'escalier.
Drapée d’une aura romanesque, la réalisation de Johnnie To, aboutie et totalement personnelle, atteint ici un sommet de méthodisme et d’absolutisme creusant dans les sous-sols graniteux et vénéneux du monde des triades pour donner forme à un objet ferme et sans concession d’un monde titanesque à la petite vertu.
Non dénué, malgré son sérieux et son apparente gravité, d’un certain second degré, se gaussant des mythes et traditions ancestrales tout en leur faisant prendre de fausses apparences nobles, le diptyque Election entre sans complexe au panthéon des grands polars.