Embrassez qui vous voudrez et entrez dans la danse
Embrassez qui vous voudrez (2002) est un film choral comme on les aime : des personnages bien campés, des dialogues ciselés, un humour qui fait mouche. Michel Blanc décortique avec cynisme les failles et les travers de différents personnages qui vont se croiser, s’aimer et se tromper le temps d’un été entre Paris et le Touquet.
Elisabeth (Charlotte Rampling) est une bourgeoise oisive que son mari (Jacques Dutronc) délaisse. Alors que ce dernier reste sur Paris, elle part au Touquet avec une amie, jeune mère célibataire (Clotilde Couraux). Elle retrouve également sur place Jérôme (Denis Podalydès) et Véronique (Karin Viard), qui n’ont plus le sou mais tentent de sauver les apparences. Dans son hôtel grand luxe, Elisabeth fait la connaissance de Lulu (Carole Bouquet), fatiguée d’un mari maladivement jaloux (Michel Blanc) qui ne lui laisse aucun répit.
Pourquoi voir ce film ? En premier lieu, pour le talent incontestable de Michel Blanc. En tant qu’acteur et en tant que réalisateur. Pour la plupart d’entre nous, Michel Blanc est surtout l’un des comédiens cultes de la troupe du Splendid, incarnant pour toujours son personnage de loser palot, dégarni et maigrichon aux répliques hilarantes (Les Bronzés, Les Bronzés font du ski, Viens chez moi j’habite chez une copine). Si nous revoyons ces films, années après années, avec le même plaisir, on comprend bien volontiers que l’acteur ait eu envie de passer à un registre plus sérieux.
Déjà dans Tenue de Soirée de Bertrand Blier (1986), il nous donnait à voir une autre facette de son talent. Dernièrement on a pu le voir dans L’Exercice de l’Etat de Pierre Schöller, excellent dans le rôle du directeur de cabinet du ministre. Avec Embrassez qui vous voudrez (son 4e film en tant que réalisateur), il excelle dans le rôle d’un psychotique, maladivement jaloux, qui pense que sa femme est une nymphomane qui le trompe avec la terre entière.
Acteur inspiré, il sait également décrire avec brio les névroses de ses contemporains. Les hommes surtout en prennent plein leur grade : infidèles, goujats, faibles, paranoïaques… Michel Blanc dresse un portrait peu reluisant de ses congénères ! A contrario, il semble éprouver une certaine tendresse envers les femmes, voire une admiration. Charlotte Rampling et Carole Bouquet rivalisent d’élégance, d’intelligence et d’humour. Et bien sûr, à côté d’elles, comment ne pas saluer la prestation de Karine Viard, qui a d’ailleurs obtenu un César pour ce rôle. Là où d’autres actrices semblent frileuses à l’idée de se montrer sous un jour déplaisant, Karin Viard brille dans ces rôles où rien ne la met en valeur.