Il est peu dire que « La Loi du marché » m'avait laissé franchement dubitatif, en très grande partie à cause de sa forme frôlant l'amateurisme le plus total, choix délibéré et hautement discutable de la part de Stéphane Brizé. Pourtant, j'ai décidé de lui donner une nouvelle chance, notamment parce que j'avais aimé certaines de ses précédentes œuvres, mais aussi (et surtout?) parce que la bande-annonce avait su être intense et franchement accrocheuse, laissant entrevoir un puissant brûlot social. Ce n'est pas tout à fait le cas, mais c'est quand même nettement plus convaincant.
D'abord parce que le sujet se prête mieux à une mise en scène caméra à l'épaule, que ce soit à travers les réunions, les échanges (parfois houleux), les négociations : ça sent le vrai et justifie donc nettement plus le procédé. De plus, si Brizé avait parfois beaucoup mal à dire « coupez » au bon moment précédemment, c'est relativement le cas ici, ce qui n'empêche pas quelques longueurs et scènes légèrement pesantes, d'autant que la mécanique du récit amène à un aspect un peu répétitif dans la dernière ligne droite, cette caméra bougeant à longueur de temps finissant (quand même) par me fatiguer sur la durée.
Mais c'est un vrai film sur notre époque, documenté, intelligent et intéressant, engagé au sens noble du terme, certes totalement parti pris, ce qui n'empêche pas une réelle lucidité sur la lutte menée par les différents employés, loin d'être simpliste ou manichéenne, le réalisateur n'oubliant nullement de montrer les relations parfois très tendues entre les ouvriers, notamment quant à la manière de mener la grève et les négociations face au patron. Le tout interprété par un Vincent Lindon à 200% et d'excellents comédiens amateurs, la jolie Mélanie Rover en tête. Sans doute pas le grand film social que l'on était en droit d'attendre, la faute à des choix de mise en scène et de scénario pas toujours concluants, mais une œuvre sincère et souvent dense, méritant clairement qu'on s'y arrête deux heures. En lutte, camarades !