Ancien comptable et chansonnier, André Berthomieu est passé à la réalisation en se considérant lui-même comme un pur technicien, dénué d'ambitions artistiques ou innovantes. Autant dire qu'avec cette approche, aucun chef d'œuvre de son cru ne restera à la postérité, ce qui ne l'a pas empêché de tourner une bonne soixantaine de long-métrages au cours de trois décennies (grosso modo de 1930 à 1960).
"En légitime défense" figure parmi les belles réussites du bonhomme, petit polar de la fin des années 50, qui se met en valeur par des dialogues de haut-vol signés Frédéric Dard. Ceux-ci apportent au film une verve comique et une authenticité qui font tout son charme et le distinguent du tout-venant, auquel un scénario plutôt banal et une mise en scène bateau risquait de l'assimiler.
Le récit se déroule dans le décor de Pigalle, entre le cabaret "La nouvelle Eve" et le bar "L'ami Pierrot", tenu par un provincial monté à Paris (Philippe Nicaud), en ménage avec une danseuse du music-hall voisin (Maria Mauban), et racketté par une bande de malfrats.
Lorsque Albert le caïd (Robert Dalban) envoie p'tit Bob (Pierre Mondy, excellent) réclamer une rallonge à notre bistrotier, celui-ci refuse. C'est le début des ennuis…
La distribution comprend également Bernard Blier, dans le rôle du flic ancien copain de régiment, qui va tenter de sauver les miches de son vieux pote, pris dans les filets de la justice et du crime organisé. La cote de sympathie de comédiens tels que Mondy, Blier, mais aussi Jean Lefèvre, Rosy Varte ou Léonce Corne joue évidemment en faveur du film, suffisamment attachant et rythmé pour faire oublier son manque d'originalité et son héros un peu fadasse.
Et surtout, quitte à me répéter, les dialogues émaillés d'argot sont un vrai bonheur.