En chanteurs

En Colombie, la famille Madrigal habite une maison animée et chacun de ses membres possède un pouvoir magique. Luisa a une force surhumaine, Isabela fait pousser des fleurs, Peppa contrôle la météo, etc. Cette capacité apparaît au cours d’une cérémonie qui a lieu au début de l’adolescence. Pourtant, Mirabel, elle, n’a pas reçu de pouvoir à la consternation de tous. Elle tente de faire bonne figure, mais son angoisse et sa rancœur sont tenaces, surtout lorsque la cérémonie de son petit cousin Antonio approche. En outre, de curieuses impressions perturbent la jeune femme. Et si tout n’était pas parfait dans cette famille ?

Réalisé par le créateur de Raiponce et scénarisé par celui de Vaiana, Encanto est le résultat d’un réel talent. Tout d’abord, l’esthétique est très agréable avec ses formes rondes et ses couleurs rutilantes. La jungle, les costumes et les décors éclatent de mille teintes lumineuses, c’est une pure merveille. Ensuite, les personnages sont joyeux, volontiers comiques, et leurs expressions outrancières ; on rit beaucoup. Enfin, la musique latine est entraînante et les chansons (ça reste du Disney) sont carrément puissantes. Bref, cette œuvre est une réussite.

Suivant la nouvelle mode, il n’y a pas d’histoire d’amour (vaguement à la fin avec des personnages secondaires) et le film est une ode au girl power. La descendance de la matriarche est essentiellement féminine et les hommes sont soi falot (Bruno) soit des enfants (les fils de Peppa et Félix). C’est un trop appuyé, car les autres personnages masculins ne sont que des faire-valoir (les époux) ou des idiots (mention spéciale à Mariano dans le rôle de la potiche). Bon, on va faire avec.

L’histoire, en revanche, n’est pas du tout amusante. Elle décrit de manière symbolique les dégâts provoqués par un deuil non terminé. En effet, la grand-mère Alma ne s’est jamais remise du meurtre de son mari (ça se comprend) et reporte toute sa peur sur sa descendance. Mirabel, le vilain petit canard sans pouvoir, s’évertue à communiquer puisqu’il ne lui reste que ça pour exister dans cette famille. Elle perçoit donc ce mal-être et rue dedans avec toute la candeur et la fougue de sa jeunesse. Dès lors, les secrets de famille et les malaises sont exposés et font voler la famille en éclat, matérialisé par la destruction de la maison. Et (c’est un Disney donc c’est possible), c’est encore Mirabel qui, à force de communication, amène les membres de la famille à se réconcilier et à reconstruire leur foyer. C’est joli, mais assez triste. Attention d’ailleurs à la scène finale avec les papillons. La symbolique des défunts partant au Paradis est inratable, même pour des enfants, et rend donc cette séquence vraiment dramatique.

Encanto est un excellent film d’animation qui peut convenir aux enfants (mais pas trop jeunes à cause de la tristesse exposée). Les images et la musique sont extraordinaires et, mis à part le message légèrement misandre, l’histoire est intéressante. À apprécier, donc.