Le film fait le pari de dénuder le thriller pour ne lui laisser que la tension la plus pure : celle de la parole.
Cette parole ne sera jamais doublée de l’action correspondante, et inversement une des seules scènes d’action du film, celle d’ouverture, est quasiment muette.
On découvre ensuite le personnage de Jacques Billard, interprété par Vincent Lindon. Celui-ci va prendre toute la place de l’intrigue dès lors qu’il disparaîtra de l’écran, au travers des mots d’Hubert Antoine, personnage d’une grande complexité joué par Roschdy Zem.
Tous ces propos ne seront jamais autant remis en cause que lorsque Hubert Antoine disparaîtra à son tour, dans une scène où Jacques Billard parle à Stéphane Vilner (Pio Marmai) tandis que nos yeux sont eux rivés vers l’arrière plan qui nous apprend la mort d’Hubert Antoine via les condoléances que semble recevoir sa compagne, nouvelle dissociation des yeux et des oreilles.
Stéphane Vilner (Pio Marmai), journaliste, est là pour recueillir les propos d’Hubert. Le duo, aussi bien d’acteurs que de personnages, est très dynamique et est le coeur qui fait battre le film. Lui aussi détient sa propre vérité, certainement voilée par un désir de réussite.
Toute la tension du thriller tient aux paroles de ses personnages, à cet échange interposé. Il n’y a pas de vérité, il n’y a aucun autre artifice du scénario pour tenir le spectateur en haleine, n’en déplaise à Boîte noire et à Pierre Niney au milieu de son lac. On s’intéresse ici à la fragilité de la notion de vérité, le constat final étant que l’affaire dont il est question n’a aucune importance, les personnes qui la composent non plus, ne compte que cette recherche de la vérité. L’article de Libération s’appelle « Révélations sur un scandale d’état », le film s’appelle « Enquête sur un scandale d’état ». Il n’y a pas de révélations pour rassurer le spectateur, il n’y a qu’enquête.
Il n’y aura pas non plus d’autre dénouement que l’impuissance de tous les personnages face à ce système. Mais ce système n’est pas celui du trafic de drogue international comme on pouvait s’y attendre, mais bien celui du combat des vérités.