Amatrice assumée du genre horrifique, ce n’est qu’hier que j’ai regardé « Esther » pour la première fois. Il faut bien avouer qu’il y avait beaucoup d’éléments accrocheurs : l’affiche du film bien sûr, Vera Farmiga dans un des rôles principaux, une production dite « internationale » avec Leonardo DiCaprio et Joel Silver parmi les producteurs. Bref, on a confiance.
[Spoilers à venir]
Après avoir perdu leur troisième enfant, un couple décide d’adopter une petite fille nommée Esther. Comme on le devine avant même de lancer le film, cette dernière est évidemment très étrange, et va leur mener la vie de plus en plus dure.
On voit d’ores et déjà venir le sujet très éculé de l’enfant tueur ou l’enfant possédé, et moi je dis : aucun problème avec ça. Pour ne citer que ces deux exemples, je trouve que [Rec] a très bien exploité le thème du « zombie » associé au found-footage, et Conjuring a honorablement revisité le thème de la maison hantée. C’est dans les vieux chaudrons qu’on fait les meilleures soupes.
Esther se décrit donc comme un thriller psychologique horrifique.
Je comprends d’où viennent tous ces qualificatifs, mais ça fait quand même trois promesses à tenir.
Le concept de la femme enfermée dans un corps d’enfant reste original. A part Claudia dans « Entretien avec un vampire », je suis bien incapable de citer un autre personnage de fiction se rapprochant de près ou de loin d’Esther. Même si on s’y attend, la scène où elle nous révèle sa véritable nature est délivrée avec force et la jeune actrice y est assez bluffante.
Pour autant, le film reste bourré d’incohérences diverses qui épuiseront la crédulité du spectateur. La principale incohérence se nichant à mon sens dans le personnage d’Esther lui-même : un personnage très érudit, malin, sournois etc… et qui perd toute sa profondeur dans la dernière demi-heure du film en se transformant en boucher psychopathe sans une once de jugeotte. Il faut bien mettre un point final à toute les intrigues me direz-vous. Je peux le pardonner de la part d’un slasher classique et assumé, mettant en scène un énième tueur en série. J’ai beaucoup plus de mal à pardonner à Esther, au potentiel hautement dérangeant, de clôturer le tout sans aucune subtilité et à grand renfort de clichés.
La torture psychologique qu’Esther est censée infliger à cette famille, en particulier à ces membres les plus fragiles, n’a que très peu d’impact. Le film va trop vite pour ça. Pour que l’invasion d’Esther dans le quotidien de cette famille soit à la fois malsaine et plausible, je pense que l’intrigue aurait dû se dérouler au moins sur plusieurs mois.
Personnellement, je ne vois aucune exploitation du complexe d’Œdipe, mais plutôt une volonté du réalisateur de nous « choquer » parce qu’il aura un jour entendu parler d’hypopituitarisme dans X documentaire. Sauf que je n’en ressors ni choquée, ni dérangée, ni émue, ni quoique ce soit. Juste très modérément divertie.
Esther me laisse un sentiment de gâchis énorme. Encore un de ces films qui tenait une bonne idée mais qui n’aura pas eu le courage d’aller jusqu’à la subversion. Il finira au contraire dans un mièvre très malvenu. La réalisation est absolument quelconque et ne mérite aucune analyse particulière. En revanche, je reconnais volontiers que le jeu des actrices (Kate, Esther et Maxine) est très bon et sauve le film de sa nanardise.
Désolée, Esther ne sera pas une des plus grandes méchantes de l’Hollywood, et je me passerais d’un prequel. Il pourrait bien tuer le personnage d’Esther une seconde fois.