Et dire qu'il existe encore des hommes,
Gagnés par le mythe de cette foutue pomme,
Qui osent toujours, sous des prétextes infâmes,
Parler de sexe faible pour définir les femmes.
Nadine Labaki prouve, dans sa dernière création
Qu'il existe tout de même de nombreuses conditions
Où les hanches d'une femme enroulées dans un châle
Sont parfois plus solides que les épaules d'un mâle.
J'en veux pour preuve l'histoire de ce village
Qui vit depuis longtemps sur un bel héritage.
Celui où cohabitent dans une entente polie,
Le croissant de l'Islam et la Vierge Marie.
Les conflits armés entre fidèles de leurs religions
Qui sévissent ailleurs depuis des générations
N'atteignent guère les habitants de cette communauté
Car du monde extérieur ils se trouvent isolés.
Cependant, à la suite d'une stupide maladresse,
Le Chrétien accuse l'autre de saborder sa messe.
Et les viles querelles jusqu'alors oubliées
Déchirent le village en deux camps opposés.
Les hommes, s'affrontant sans raison judicieuse,
Ne laissent guère le choix aux femmes silencieuses.
Lasses de porter le deuil de leurs maris et frères,
Elles décident d'une voix de faire taire cette guerre.
D'abord drôles et légères, elles feignent un miracle
Déguisant l'une des leurs en un semblant d'oracle.
Mais la Vierge a bon dos et ce qu'elle prédit
N'intéresse pas les hommes mais attise le conflit.
Alors, lucides sur le pouvoir d'une belle paire de fesses
Sur l'esprit d'un homme qui perd toute sagesse,
Elles décident, dans l'espoir de faire passer l'orage
D'inviter cinq belles étrangères au sein de leur village.
Mais là encore, d'abord conquis par ces nouvelles venues,
Les hommes exaltés se tapent toujours dessus.
Le remède des femmes pour freiner cette colère ?
Des gâteaux au haschisch, calmants et somnifères.
Contre-point dramatique à cette joyeuse pagaille,
L'arrivée tragique de trop jeunes funérailles.
Une mère éplorée semble la meilleure raison
Pour oublier un instant sa guerre de religions.
Enfin Nadine, moue boudeuse et yeux cernés de suie
Nous lance un regard plein de mélancolie
Susurrant à mots doux : « Et maintenant, on va où ? »
Sans hésiter ma belle, avec toi, n'importe où...