Il m'a fait souffrir ce film. 2 années de suite à l'analyser, le décortiquer, essayant de le comprendre sous tous les angles.
Dans une vie insipide d'étudiant, ça laisse des traces. Au point même que je ne voulais plus entendre parler de Fellini. Même pas Armarcord qui pourtant était une de mes références du loufoque du réalisateur Italien.
Et voilà que pour une formation sur l'analyse d'image, je me surprends à faire analyser l'intro de E La Nave Va. J'ai dû me réconcilier sans m'en rendre compte. Alors pourquoi pas une petite critique sur senscritique. Ca va exorciser un peu le truc...
Je pense que E La Nave Va est une fable. Le titre fait penser à un livre pour enfant, une comptine. Une comptine qui raconte qu'un monde touche à sa fin, mais que la vie continue.
Donc, la fin d'un monde et d'une Diva mais en filigrane, la fin de l'opéra, du cinéma, de l'Italie à la veille de 14-18, de l'Europe...
La première séquence, extrêmement adroite retrace l'histoire du cinéma, du muet au parlant et notre regard va s'échouer dans l'oeil d'une caméra, comme si on en avait fait le tour. La boucle est bouclée et cette séquence initiale résume l'ensemble du film à travers la découverte des artifices du cinéma qui feront le parallèle avec les artifices du monde que l'on va découvrir.
Durant le film, Fellini s'amuse à jongler entre les styles, passant de la comédie au drame tout en survolant la satyre, toujours dans l'idée de montrer du beau (voir du très beau dans la séquence des verres). Les portraits des personnages sont particulièrement savoureux, tous plus dingues les uns que les autres.
A travers cette société de l'élite, bloquée dans ses préjugés, égocentrique au possible subsiste la forme d'art d'un temps révolu et d'un superficiel latent.
Car durant tout le film, le spectateur va naviguer à vue sur un océan de superficiel, de lourdeur pour faire éclore la beauté de l'art dans sa globalité. Dans le bateau naviguent les grands d'hier qui se débattent lourdement pour exister encore un peu.
La dualité avec ce monde à part se trouve dans la soute. Avec le monde d'en bas, des autres.
Le réalisateur va sans cesse faire des aller retour entre ces sociétés qui se regardent en chien de faïence, mais qui finalement se ressemblent beaucoup.
La fin du film dévoile la machinerie artificielle de ce monde qui s'achève. Mais surement, Fellini voulait il aussi dénoncer la force de suggestion que peut avoir le cinéma. Loin de ne servir à rien, cette scène boucle tout le propos du film dans la logique de son thème.
Et la barque s'en va au loin, avec son rhinocéros, parce que si on finit pas sur de l'absurde, on est pas dans du Fellini...
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