J’ai eu l’occasion de visionner Eté 85 lors d’une avant-première SensCritique au Cinéma Beau Regard à Paris en présence de l’équipe (Ozon et ses trois jeunes acteurs).
Librement adapté du roman La Danse du coucou d’Aidan Chambers, le film fait l’objet d’une romance morbide entre deux jeunes garçons.
Pourquoi l’été 85 ? Parce que même si Ozon aurait préféré rendre hommage à l’année de ses 16 ans, il n’a pas pu se résoudre à renoncer à l’utilisation du titre « In between days » des Cure, sorti en 1985, dont il se sert comme d’un Leitmotiv. En réalisant son 19ème film en 21 ans, François Ozon nous rappelle sa présence désormais incontestable et récurrente dans le paysage romantique du cinéma français… et en Super 16, s’il-vous-plaît.
Bien que donnant envie d’aller se baigner sur les plages du Tréport et d’y rencontrer des petites anglaises (ou anglais, c’est selon), le dernier film de François Ozon me semble être assez bancal et inégal… à tous les niveaux. A commencer par le rythme. Si les deux premiers tiers du film nous accrochent, le sujet de cette troisième et dernière partie manque de consistance et de saveur, d’un petit quelque chose qui nous passionnerait. Pourquoi ? Peut-être parce que le mystère est trop vite résolu et que cinématographiquement parlant, l’intérêt aurait été de le conserver intacte jusqu’au bout (Ozon a délibérément choisi d’annoncer le « pari » entre les jeunes hommes en milieu d’histoire et non dès le début comme cela est le cas dans le roman, ce qui indique qu'il s'était li-même posé la question du suspense).
Mais l’histoire d’amour non jugée, non stigmatisée, entre les deux jeunes hommes, est touchante, le tout ayant un petit air inquiétant de Plein Soleil à certains moments, et attendrissant de Call me by Your Name à d’autres et agrémentée de dialogues tantôt efficaces tantôt un peu trop lourds.
Heureusement, le casting des personnages principaux est quasi parfait. Félix Lefebvre et Benjamin Voisin font littéralement exister le film, le premier tant grâce à sa candeur que grâce à sa douceur, le second par sa force et sa « gueule » de petit con, inspirées par River Phoenix. J'ai d'ailleurs pris une claque en découvrant Benjamin Voisin, qui, je dois l’admettre, dès la bande annonce avait suscité ma curiosité. J’irais jusqu’à dire qu’il devient dès aujourd’hui, pour moi, un gage de qualité qui me donnerait envie d’acheter une place de cinéma si j’apprenais qu’il se trouvait au casting.
Mes seuls regrets ? Philipine Velge et Melvil Poupaud apparaissent trop peu alors que leur place dans l’intrigue pourrait être davantage développée.
Si je dois conclure, je dirais que les messages sous-entendus par le réalisateur -et/ou le romancier- tels que le regard que l’on porte sur l'Autre en tant qu’objet de nos désirs ou celle de la culpabilité dans un drame sont vite balayées par cette sorte de happy end auquel on croit finalement assez peu, pour ne pas dire qu'il est malaisant.
Bilan en demi-teinte, donc, pour ce long métrage de François Ozon mais vrai coup de cœur pour les acteurs !