Les films relatant les histoires d'amours sont légions au cinéma. Ils suivent toujours les mêmes clichés si cher à ce thème et abordent toujours un ton mièvre au possible, donnant au spectateur la possibilité de s'identifier aux protagonistes et avoir de l'empathie pour eux. Heureusement, il existe des films tentant de briser ces codes récurrents.
Michel Gondry est parvenu à réaliser un film pouvant toucher tout le monde : la gente féminine aimant ce genre de cinéma, la gente masculine qui va s'identifier à Joel et vivre ses sentiments évolutifs.
Un réalisateur à la conquête de l'Ouest Sauvage
Avant de débuter cette review, une légère mise au point est importante afin de mieux comprendre les motivations du réalisateur. Michel Gondry, tout comme Tim Burton, possède un univers directement reconnaissable au premier coup d’œil. Il s'est notamment illustré dans le milieu des clips musicaux (Björk : Human Behavior, Rolling Stones : Like A Rolling Stones et IAM : le Mia par exemple) et sa notorioté outre-Atlantique ne cesse de croître. Il va donc réaliser en 2004, (sur un scénario de Charlie Kaufman) le film Eternal Sunshine Of The Spotless Mind (Oscar du Meilleur Scénario en 2005) qui va permettre au Monsieur de montrer tout l'étendu de son talent.
L'histoire est un perpétuel recommencement
Commençons donc par la partie scénario : Essayez d'imaginer que vous vous réveillez un beau matin, et qu'en ouvrant votre journal intime, 2 ans de votre vie ont disparue ? C'est le postulat de départ de ce film prenant grandement ses inspirations des livres de Boris Vian : L'Herbe Rouge et L'arrache-Cœur.
On suit donc Joël (incarné ici par le très juste Jim Carrey loin de ses fantaisies habituelles) qui rencontre au détours d'une gare Clémentine (jouée par la non moins géniale Kate Winslet). Va s'ensuivre une phase de séduction entre les deux personnages : l'un étant complètement extravagant et excentrique (Clémentine) et l'autre froid, timide et renfermé sur lui-même. Ces deux entités que pourtant tout opposent, vont commencer à vivre un début d’idylle... Juste avant de retrouver Joël au volant de sa voiture et vidant toutes les larmes de son corps. Comment en est-on arriver là ? C'est ainsi que pendant 1h48 on va suivre ce scénario pourtant simple au premier abord mais faisant montre d'une originalité mêlant SF (à la Mémento) et Romance. On va comprendre à travers les souvenirs de Joël se qu'il a pu éprouver pour Clémentine et leur première rencontre...
Ce scénario tient toutes ses promesses et permet au spectateur de rester scotché à son siège pendant ces presque 2h de grand cinéma, passant de moments de pur joie vers des moments de pure tristesse et même de la colère. C'est exactement se que le 7ème Art doit permettre aux spectateurs de vivre : tout le spectre émotionnel ; et Michel Gondry le fait avec brio.
Videz la tête des personnages, mais remplissez celle du spectateur de rêves
Côté réalisation, Michel Gondry reste sur ses habitudes : comme on dit on ne change pas une équipe qui gagne. On a très peu de post-production et beaucoup d'improvisations (avec la scène du défilé d'éléphants par exemple) et de fait-main. Chaque plan, chaque détail mis en place dans la réalisation sert à mieux comprendre ce qui arrive au héros. Michel Gondry va jusqu'à mettre de nombreux effets de flou dans sa réalisation, permettant de voir la disparition progressive de la mémoire de notre héros. Toutes les personnes entrant dans ce flou noir est voué à disparaître de l'écran et donc de la mémoire de Joël. On va passer de plans très larges en début de film pour montrer la fuite en avant du héros vers des plans beaucoup plus serrés simulant une intimité. Ces plans permettent de montrer la fatalité s'abattant sur notre héros.
On a donc du tout bon niveau réalisation, autorisant les choses les plus folles chères à Michel Gondry.
Un casting cinq étoiles au service de la sobriété
On a également un jeu d'acteurs aux petits oignons. Avec un Jim Carrey en tête, incarnant un Joël à la limite de la dépression, antipathique au possible et cherchant à être sauvé de sa misérable vie. On est loin de son jeu habituel, tout en roue-libre et en gros moments de débilités propre à Jim Carrey. Et que dire de Kate Winslet, qui a reçue en 2005, l'Oscar de la Meilleure Actrice pour son rôle de Clémentine. C'est une femme extravagante au possible, changeant de comportement comme elle change de couleur de cheveux et noyant ses démons dans l'alcool.
D'autres personnages secondaires tiennent aussi une place importante tout au long du film. Un Mark Ruffalo tout jeune (connu aujourd'hui pour son rôle de Hulk pour l'écurie Marvel) mais pas inexpérimenté qui montre de très bonnes choses dans sa composition de jeune technicien prêt à tout afin de séduire l'actrice Kirsten Dunst. Un Elijah Wood (Frodon Sacquet dans le Seigneur des Anneaux) cherchant à jouer dans un autre registre que celui de l'Héroïc Fantasy et jouant un sociopathe de première catégorie. Le spectateur se demandera même si il ne mériterait pas tomber avec Gollum dans la Montagne du Destin, c'est dire à quel point celui-ci est antipathique au possible. Enfin, Tom Wilkinson incarne le rôle du Docteur Howard Mierzwiak et signe une composition parfaite.
Il n'y a donc rien à redire sur ce casting cinq étoiles.
L'interprétation des rêves selon Gondry
Pour conclure, ce film est un pur chef-d'oeuvre de mise en scène et de scénario. Michel Gondry et ses acteurs ont su imposer leurs empreintes et leurs savoir-faire tout au long de ce film. C'est un film tout en beauté, en subtilité et en finesse. Il permet de réconcilier une partie du public boudant les films à l'eau de rose. Il faut donc le voir pour les nombreux points cités précédemment. Un film qui restera de nombreuses années gravé dans votre mémoire. Du tout bon donc.