Evil Dead, c'est une sacrée trilogie, quand même.
Une série de film dont chaque opus a sa propre identité, son propre style, tout en restant cohérents entre eux grâce à la patte si reconnaissable de Sam Raimi.
Débutée par un film d'horreur pur, elle tendra dans le second opus vers la comédie d'horreur avant de passer à la comédie surnaturelle dans le dernier volet.
Ce qui amène fatalement à cette question : Quel est le ton de la saga Evil Dead ? Quel opus lui a offert son identité ? Est-ce une saga d'horreur burlesque, une série de comédies horrifiques ?
Ce qui a amène à une seconde question : Comment faire un remake de Evil Dead ? Quel ton employer ? Mixer l'horreur et le comique cartoon comme dans le second volet ? Se concentrer sur l'humour comme dans le troisième ? Ou faire de l'horreur pure ?
C'est ce dernier choix qu'a fait Fede Alvarez, et il faut avouer que revenir à l'horreur qui a fait les fondements de la saga Evil Dead alors que le grand public a plutôt tendance à retenir l'aspect comique de cette licence, c'est un choix plutôt courageux.
Et il faut bien le dire, le pari est réussi.
On est d'accord, si vous recherchez des scènes rigolotes comme Ash se battant contre sa propre main possédée à la Tom et Jerry, vous allez être déçus. Je l'avais été la première fois, d'ailleurs.
Mais si vous venez pour retrouver l'angoisse que cherchait à vous filer le premier Evil Dead, n'attendez plus, vous serez comblés !
Fede Alvarez a bien compris ce qui avait fait le succès du Evil Dead originel, et lui apporte ce qui lui a manqué : Le budget.
Ok, c'est vrai que le film original fauché et bricolé avec 3 bouts de ficelle a son charme, mais j'ai un peu de mal à m'investir dans le métrage quand je vois Ash dégommer des Deadites en carton-pâte. Surtout vers la fin, où les effets pratiques sont beaucoup trop voyants.
Là, comme le film a du budget, il perdra certes le charme des 3 bouts de ficelle, mais gagnera en crédibilité. Quand un personnage se transforme en Deadite, le maquillage et les lentilles sont convaincants. Quand un personnage se fait attaquer, les effets sanglants sont crédibles, et pas montés à la truelle pour cacher le manque de moyens. Fede nous montre tout, il assume et surtout il se fait plaisir !
Y'a du membre arraché, des grosses gerbes de sang, des mutilations dégueulasses (le coup de la langue est particulièrement efficace). Tout est fait pour que l'on ressente la fragilité du corps humain, que sa destruction nous paraisse aussi dérangeante que possible. Et tous ces effets gores alimentent une ambiance malsaine et poisseuse, on sent la détresse de cette bande de jeunes totalement dépassés par une force maléfique cruelle et implacable. Les 10 dernières minutes du film sont un peu le paroxysme de cette démarche, le film prend des allures de slasher infernal, avec cette pluie de sang de toute beauté, une dernière partie qui se conclue par une scène gore tellement jouissive qu'on en bondirait presque de sa chaise en la visionnant.
Alors oui, on se tape quelques jump-scares dans ce processus de retour à l'épouvante, mais franchement, si vous avez plus de 14 ans et demi et un tant soit peu de connaissances dans le domaine du cinéma d'horreur, ça ne devrait pas vous gêner plus que ça.
Les acteurs sont d'ailleurs très crédibles dans leurs rôles, mention spéciale à l'actrice principale, Jane Levy, qui s'est beaucoup investie dans le sien, au point d'accepter de se faire enterrer vivante pour les besoins d'une scène.
C'est d'ailleurs son personnage qui aura droit au meilleur développement du film. La petite junkie ratant chacune de ses tentatives de sevrages, pourchassée et possedée par une force maléfique, reflet de ses plus sombres frayeurs, et qui trouvera la force de se relever malgré les coups durs et à venir à bout d'un mal ancien qui dépasse le commun des mortels. Ce qui me rappelle pas mal le looser devenu héros qu'est notre ami Ash Williams.
Mais il ne faut pas croire que Fede Alvarez est dans le fétichisme, qu'il ne fait que réappliquer la formule de son ainé comme un brave petit fanboy. Non, il parvient malgré l'écrasante aura de la saga Evil Dead à construire son propre langage.
On peut regarder à la suite Evil Dead et Evil Dead Remake, et constater que s'ils ont une base commune et des intentions communes, ils ont chacun leur identité propre.
C'est dommage qu'un tel film n'ait pas eu droit à une suite. J'aurais bien aimé voir une nouvelle trilogie Evil Dead dirigée par Fede Alvarez.
Quoique. Vu que c'est la mode actuelle de créer des suite inattendues à des franchises, de faire des remakes, et que le protagoniste du film est une femme, peut-être que....
Mais je divague.
Voyez ce film. Il vous veut du bien.