Fahrenheit 9/11 par MacGuffin
Fahrenheit 9/11 (palme d'or 2004, mouhahaha) est, a priori, un film boulimique dans lequel Moore semble vouloir brasser tous les sujets : l'élection houleuse de 2000, l'ingérence de Bush, le 11 septembre, la guerre en Afghanistan, la guerre en Irak. Et pour ce faire, il est obligé d'aller vite, trop vite, et de ne rien traiter en profondeur. Sa principale erreur est de mettre toutes les images, tous ses arguments, au même niveau (Bush qui préfère jouer au Golf et pêcher plutôt que de faire son boulot de président et qui est donc un gros glandeur = les failles dans la prévention du 11 septembre). Tous les documents, toutes les interviews, se limitent souvent à une phrase, voire quelques mots, de sorte que Moore fait dire exactement ce qu'il veut à ses intervenants. Un art de la manipulation qui se retrouve aussi dans un montage de séquences parfois carrément putassier (une mère Irakinenne pleurant son fils disparu dans les décombres / la blondasse Britney Spears qui exprime son soutien à Bush en machant grassement son chewing-gum), ou dans une schématisation des faits qui finit par friser le racisme (ou, en tout cas, un narcissisme géographique très américain), comme lorsque Moore réduit la coalition internationale qui a soutenu l'intervention militaire américaine en Irak à un ramassis de peuplades arriérées (stock-shots folkloriques à l'appui), oubliant qu'on y trouvait aussi la Grande-Bretagne, l'Espagne ou l'Italie.
Tout cela donne l'impression que Moore invente ici le docu-blockbuster, le film engagé pop-corn. C'est à la fois son défaut (le film est ultra-simpliste, je viens de le dire), mais aussi, finalement, sa qualité : son humilité. Moore ne se prend pas pour un grand documentariste/auteur qui ferait objectivement état de l'Amérique à un instant t. Non. Le film vise un objectif bien plus simple : montrer que George W. Bush est un gros débile. Et c'est quand il s'attelle strictement à ce programme que Fahrenheit 9/11 est le plus efficace, quand il montre Bush, images d'archives et interviews remontées à l'appui, comme un couillon Texan cynique qui se prend pour John Wayne. Rire gras dans la salle (?) Moore se met ici au niveau de son sujet. Il répond à la propagande Bushienne par sa propre propagande, il répond au simplisme de la vision du monde Bushienne par sa propre vision simpliste du monde.
Humilité, je vous dis.