Le réalisateur et documentariste allemand Werner Herzog atteint avec ce film une dimension baroque totalement démesurée touchant à la suprématie filmique. Le cinéma prend une dimension naturaliste absolue et le récit est souvent emporté par la vague chaotique de l'absolutisme.
Film au tournage chaotique qui faillit emporter une partie des figurants et le réalisateur lui-même, Fitzcarraldo suit les aventures de Brian Sweeney Fitzgerald interprété par l'acteur fou Klaus Kinski, personnage de rêveur mégalomane qui décide d'aller construire un opéra au cœur de la forêt Amazonienne.
Le script se suffit à lui-même pour comprendre le poids de démesure et de folie qui pése sur cette œuvre de malade. Klaus Kinski y est fidèle à lui-même, totalement habité, avec son visage de gargouille humaine et ses envolées de folie pure qui touche au suprême. Pour l'anecdote, il faut savoir que pendant le tournage, les figurants de la tribu indienne engagée sur le tournage, proposèrent à Werner Herzog de tueur Kinski, tellement il les terrifiait...
A l'image de son personnage principal, le film touche lui-même à la démence pure avec ces idées totalement folles, comment faire traverser un bateau d'une rive à une autre... l'idée même de construire un lieu de haute culture au milieu de la jungle, seuls les rêveurs peuvent soulever des montagnes dit l'un des protagonistes...
A l'image de son auteur dont les thèmes de prédilection et les ambitions touchent souvent à l'inconcevable et à la folie douce, 10 ans après un autre morceau de bravoure à travers la jungle amazonienne, Aguirre La Colère des Dieux, déjà avec Kinski, ce film rassemble toutes les transgressions et l'absolutisme, inconcevable encore aujourd'hui, sans passer par l'effet numérique. Herzog emporte tout son monde dans un enfer vert humide et hostile qui faillit les emporter.
De cette folie naissante de l'idée même, de ce postulat de base qui à lui seul vaut déjà une montagne d'impossibilités transgressées, naquit une œuvre unique marquée du sceau de l'imaginaire prenant vie à travers la volonté d'un homme de mettre en scène l'inconcevable.
Klaus Kinski y est pourtant quasiment sobre et retenu dans ce personnage de rêveur mégalomane dont l'imaginaire emporte le commun des mortels.
Si un seul mot devait venir à l'esprit pour définir ce film ce serait folie!