Voici un intéressant film de Lautner tiré du roman "Langes radieux" de Jean Amila paru dans la "Série Noire" (Gallimard) en 1963 sous le n°763.
Le scénario qui en a été tiré par Marcel Jullian et Michel Audiard respecte grosso modo le roman tout en simplifiant le nombre de personnages.
Dans la filmographie de Lautner, "Fleur d'oseille" se situe entre "ne nous fâchons pas " et "le pacha". Il a relativement peu eu de succès et à mon avis à tort car ce film amène des idées plutôt originales dans le polar.
C'est l'histoire d'une femme qui accouche dans un hôpital tandis que son compagnon, bandit après avoir réussi un casse juteux, vient de se faire dessouder par la police. Le bandit a cependant réussi à planquer le magot attisant ainsi de violentes convoitises. Deux bandes rivales et la police entreprennent de suivre la femme et son bébé pensant qu'elle pourra les amener à la planque.
La femme en question s'organise pour se défendre contre tous ces malfaisants.
Voilà que Lautner a réalisé un polar avec une héroïne en personnage principal qui apprend à se défendre, se défend et rend coup pour coup : bref, le polar noir féministe en 1962 pour le roman et 1967 pour le film ...
Le film monte progressivement en gamme : au début, le personnage de Mireille Darc est gentiment sollicité par les truands qui avancent masqués puis tranquillement menacé avant de finir en apothéose avec une attaque à l'arme sérieuse du refuge (provençal) où Mireille Darc s'est retranchée. D'ailleurs l'attaque n'a rien à envier aux westerns où les assiégés et assaillants pratiquent des veillées d'armes avant de passer à l'assaut. Pour les amateurs, ça flingue à tout va. Sans oublier les replis stratégiques.
Je suppose qu'on s'replie... ?
Qu'est-ce que tu veux... L'attaque de front, quand on n'a pas l'aviation
Le casting est particulièrement soigné et les dialogues servis par Audiard savoureux comme toujours.
Mireille Darc campe magistralement le rôle de la femme du bandit qui vient d'accoucher. Son jeu est tout en finesse : laisser parler les hommes, faire semblant d'acquiescer et en faire à sa tête. Le tout avec le sourire enjôleur et séducteur pour laisser un espoir. Efficace et froidement séduisante.
Elle entraine dans sa fuite une copine rencontrée à la maternité, jeune mère aussi et assez dessalée aussi, Anouk Ferjac, follement séduisante dans un registre un peu plus romanesque.
De l'association Mireille Darc/Anouk Ferjac (j'ai remplacé le mot couple par association pour éviter tout malentendu), on pourrait presque dire que Mireille Darc serait l'homme et Anouk Ferjac, la femme ...
Une autre actrice excellente dans ce polar, c'est Renée Saint-Cyr dans le rôle de la directrice de la maternité outrée par les réflexions insolentes et décalées de Mireille Darc ou encore piquant une colère devant l'attitude menaçante du flic venu interroger Mireille Darc.
Sortez, ce n'est pas une prison ici, c'est une pouponnière !
Côté hommes, il y a le chef d'un des gangs joué par le sinistre André Pousse excellent en chef de guerre et commandant des assaillants avec ses réflexions toujours désabusées surtout lorsqu'il est question d'une nana qui lui tient tête.
J'ai jamais pu piffer la cambrousse... c'est plein d'routes qui mènent nulle part... de trucs qui servent à rien... on s'emmerde...
Pour continuer sur les malfrats, on retrouve avec plaisir Amidou, Henri Garcin, Dominique Zardi, Jean Luisi, Frederic de Pasquale, ...
Le flic aussi, le commissaire Verdier qui tente de négocier la récupération du magot contre une prime substantielle est joué par Maurice Biraud, dont le rôle pour le moins ambigu donnerait l'impression qu'il en pince pour Mireille Darc. Pas mauvais du tout.
Et pour finir un improbable Paul Préboist complètement déjanté en artiste-peintre et allié des deux femmes que j'ai trouvé plutôt bon.
Côté mise en scène, Lautner a réussi un bon film avec des scènes d'action bien agencées.
Je revois toujours ce film avec plaisir en particulier pour le jeu de Mireille Darc dont l'avis sur les hommes est tout en nuances
Les jules sont tous convaincus de leur supériorité. Ils nous voient toutes au garde-à-vous. Le pire demi-sel, le plus tocard des traîne-lattes se prend pour Scarface. Rouler des mécaniques, c'est la maladie des hommes.