Des tueuses en série, il n'y en a pas eu tant que ça dans l'histoire, le phénomène étant une spécialité masculine. Retracer l'histoire de l'une d'elles, Hélène Jégado dite Fleur de tonnerre, pouvait s'avérer singulier. Ce qui aurait été intéressant, c'est de comprendre ce qui peut mener à une telle folie. Le sujet a déjà été exploré, mais rarement du côté des femmes. L'argument pouvait donc être l'occasion de creuser cet aspect-là.
C'est tout ce que ne fait pas Stéphanie Pillonca. Le motif de ces meurtres en série ? Hélène se croit désignée par l'Ankou, sorte de divinité bretonne de la mort, pour devenir son bras armé. Puisque Fleur de Tonnerre a fini par se faire arrêter, la voilà face au juge qui évoque les différentes étapes de son parcours. Parcours qu'on va suivre, classiquement, en flashback. La jeune femme est employée comme cuisinière à différents endroits, souvent religieux - couvent, presbytères -, ce qui lui permet d'exercer ses talents, arsenic à l'appui. On la voit effrayée par le son de la charrette fantôme qu'elle entend dans sa tête, comme dans le film éponyme de Julien Duvivier. Le reste du temps, elle empoisonne à tours de bras.
Comme Stéphanie Pillonca n'a rien de plus à dire, il faut trouver des péripéties permettant de durer 1h30. On suit donc son histoire d'amour avec Matthieu Véron (Benjamin Biollay), sans que la cinéaste n'en fasse rien. La courte liaison avec un pirate montrant une relation sexuelle plus subie que voulue n'aura pas non plus de suite dans le film. Un passage dans un bordel est tout aussi injustifié : ni cause ni effet.
Ce Fleur de tonnerre semble avoir été principalement fait pour filmer Deborah François. Las, même sur ce point le film n'emporte qu'à moitié l'adhésion. Si l'actrice dégage une certaine grâce à plusieurs moments du film, ses scènes d'hystérie - très difficiles à jouer - sont moins convaincantes, tout comme celles où elle s'énerve sur le juge ou sur son amant. Par ailleurs sa diction, son phrasé, ne sont pas toujours crédibles pour une jeune femme du XIXème siècle. C'est finalement quand elle ne fait rien que l'actrice est à son meilleur... Enfant, elle est incarnée par Blanche François - sa jeune soeur ? - dont chaque réplique sonne faux.
La réalisation est académique : décors soigneusement reconstitués (on est chez Vermeer, même si celui-ci n'est pas vraiment du XIXème siècle !), scènes en forêt type Brocéliande, violoncelle pour installer une ambiance sur des plagiats de Schubert, cadrages sans surprise. Quelques beaux moments surnagent : un ou deux beaux plans (Hélène dans son cachot, le crâne de l'Ankou dans l'église), la scène avec le vieux qui veut mourir et remercie donc Fleur de Tonnerre, c'est à peu près tout. Sans doute Stéphanie Pillonca a-t-elle dû se laisser prendre à un leurre sur la côte car son film est un naufrage. Sans aucun trésor à en tirer hélas.