Il y a longtemps que je n’avais pas été aussi ému par un film. D’animation, de surcroît ; c’est peut-être la première fois. Flow est une petite pépite. En 1h20 d’une beauté rare, sans aucune parole, le réalisateur Gints Zilbalodis nous fait vivre l’odyssée de Flow (mais s’appelle-t-il seulement ainsi ?), un petit chat noir vivant tranquillement reclus dans ce qui ressemble à une ancienne maison de sculpteur humain. Et des humains, il n’y en a plus, dans ce film, uniquement des animaux avec des comportements et un langage d’animaux, sans anthropomorphisme (ou si peu) et c’est réjouissant. Submergé par une vague géante et l’inexorable montée des eaux, Flow doit apprendre à nager pour survivre. Au cours de son périple, il rencontre d’autres animaux et tous vont s’apprivoiser et apprendre à se respecter pour survivre : le chien joueur, le capybara endormi, le lémurien kleptomane, et l’échassier stoïque.

On pense bien sûr à L’Odyssée, ce voyage initiatique du retour, mais aussi à Rroû, récit d’apprentissage à hauteur de chat. On vit avec lui, on tremble avec lui dans des scènes terrifiantes (la tête de statue submergée, la noyade, la chevauchée d’élans), on rit aussi des comportements animaliers reconstitués par petites touches. Le film est d’une beauté esthétique impressionnante (le dessin des paysages, les scènes sous-marines, la ville engloutie entre Venise et l’Atlantide), d’une émotion saisissante et d’une certaine profondeur métaphysique : Flow atteint le sommet d’une chaîne de montagnes, montrée dès le début en arrière-plan comme destination inévitable du voyage et la clef du mystère de ce monde (car on ne sait pas pourquoi l’eau est montée). Il y rejoint l’échassier qui l’y attendait, avant d’être pris dans un tourbillon mystique le faisant disparaître et abaissant le niveau de l’eau. C’est une autre figure imposée du récit d’apprentissage : l’apprivoisement de la mort, apprendre à l’accepter pour commencer un nouveau cycle.

En sortant de la salle, on se dit qu’on peut encore s’émerveiller au cinéma devant des images sublimes, être ému aux larmes par ce chat et ce récit poétique et onirique parfaitement maîtrisé. Vivre un peu plus fort.

antoinegrivel
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2024

Créée

le 2 nov. 2024

Critique lue 22 fois

1 j'aime

Antoine Grivel

Écrit par

Critique lue 22 fois

1

D'autres avis sur Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau

Du même critique

Cher connard
antoinegrivel
7

Être V. Despentes est toujours une affaire plus intéressante à mener que n'importe quelle autre

Dissipons le malentendu tout de suite : ce n'est pas un très bon roman. Le dispositif narratif en conversation épistolaire tourne vite à vide, quoique fort divertissant les cent premières pages. Ce...

le 22 août 2022

40 j'aime

3

Connemara
antoinegrivel
7

La méthode Mathieu

Ouvrir un roman de Nicolas Mathieu, c'est un peu comme ouvrir un Houellebecq : on sait ce qu'on va lire, avec quelques variations à chaque fois, et on n'est jamais déçu. La méthode Mathieu, c'est...

le 10 mai 2022

30 j'aime

Veiller sur elle
antoinegrivel
5

Laurent Gaudé en Italie du Nord

Je sais bien qu'il ne faut jamais regarder les bandeaux, que c'est une ruse d'éditeur. Je me sens trompé par Olivia de Lamberterie, que j'adore. Une "émotion exceptionnelle", tu parles... Au moins,...

le 8 nov. 2023

16 j'aime

13