Frères ennemis est un grand polar.


Ce film évite les écueils faciles dans lesquels tombent si facilement les polars. Ici, pas de flic alcoolique en crise conjugale, pas de grand méchant toxique, mais simplement des hommes, qui ont fait les quelques choix qui leurs étaient donnés, et qui avec les cartes qui leur restent en main, tente de s'en sortir, pour eux, leurs amis et leur famille.


Le scénario est complexe, et il est très agréable de voir un polar ni trop simple et programmatique, ni trop incompréhensible (Bronx, c'est toi que je regarde). A aucun moment, le genre, exploité habilement dans ce métrage, n'y est une excuse pour prendre le spectateur pour un con. Le film a également l'intelligence de ne pas dépeindre la cité comme une ville de western, un O.K. Corral au milieu du désert. La cité, personnage central, est à la fois une ruche, un refuge, un terrain de jeu, une mère et une communauté. Il est le théâtre, avec ses acteurs et ses spectateurs où se dénoue l'intrigue. A ce titre, le film me paraît progressiste et anti-raciste.


Enfin, quelques mots sur les deux acteurs principaux. Matthias Schoenaerts, en petit voyou trahi et perdu, fait merveille dans la sensibilité et l'émotion, et dans des sautes de violence soudaines. A côte, Reda Kateb, est posé et calme, pas froid pour un sou, presque fade. Et cela apporte une force à son personnage de flic héros et voyou, qui pourrait être n'importe qui, tant il est commun. Cependant, c'est par lui, inconsciemment, qu'arrive le destin inéluctable de ses amis d'enfance, ce qui en fait un personnage complexe dépassé par ses actes. Enfin, le personnage qui fait la saveur de ce long-métrage est celui du patriarche, quelque part entre le papy gâteau et Vito Corleone, central dans l'intrigue. Il est le père de substitution pour les fils de la cité, mais il est aussi le corrupteur, celui qui représente la criminalité dans la cité.


Porté par une bande-originale très prenante, qui aurait assez peu dénoté dans un Michael Mann, il est un film complet, un polar dans la plus pure des définitions, mais qui sait dépasser son cadre pour parler d'amitié, de tolérance, de rédemption, et de la violence sociale structurelle qui amène à la criminalité.

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le 10 févr. 2021

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Agregturp

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