La première fois que j'avais entendu parler de Furie, je ne savais pas qu'il s'appelait Furie. C'était au PIFFF 2018, ils nous avaient diffusés un film annonce juste avant la projection du film d'ouverture. Une surprise. Comme j'écoutais à moitié lors de présentation, je n'avais pas vraiment saisi le contexte. La bande annonce se finissait sur un carton noir avec écrit GET IN en lettres rouges. Intrigué, j'ai essayé de faire mes recherches, sans pour autant trouver des informations. Je me dis alors que ce que j'ai vu était une sorte de parodie ou un gros troll.

La deuxième fois, c'était un pote qui me racontait qu'il avait vu "une tuerie" (au sens propre, comme au figuré) à Cannes : Furie.

Les pièces du puzzle commencent par s'emboîter : GET IN = Furie.

C'est donc avec de l'entrain, de la curiosité et le sentiment d'arriver au bout d'une quête que j'abordais cette projection.

Tout part d'un simple fait divers qu'a relevé Aurélien Molas, co scénariste du film. C'est d'ailleurs un peu ce qui fait l'attrait de tout le projet. En effet, son caractère "c'est arrivé près de chez vous" rajoute une force et une contenance au propos car on a vite fait de s'identifier à nos malheureux propriétaires. Je dois reconnaître une certaine maîtrise du récit car le basculement du réel au craquage total est fluide et presque aussi réaliste que l'histoire de base. Seulement, le revers de la médaille, c'est que j'ai cette impression de m'être fait mener en bateau car évidemment, dans la vraie vie, cela ne s'est pas du tout déroulé ainsi. On est dans de la fiction pure et dure mais le récit revendique sa véracité par rapport au réel. D'ailleurs, il n'a de cesse de nous interpeller sur ce qu'on aurait fait à la place des protagonistes en nous intimant de nous mettre à leur place.

Le film fait référence aux idées de John Locke (le philosophe, pas le mec de Lost) sur le droit naturel mais il aurait bien pu citer le fameux contrat social de Rousseau. Au fond, il est question de libéralisme au sens large mais surtout de libre arbitre. À plusieurs reprises, un État qui serait défaillant est vilipendé et ça serait à chacun de prendre ses couilles pour aller récupérer ce qui lui revient de droit (pas par le droit positif, vous l'aurez compris). Ainsi le personnage du gérant du camping (Paul Hamy, j'adore ce mec qui joue tous les registres) peut être vu comme un anarcho-capitaliste de type beauf du Nord. Mais cet homme qui fera l'effet d'un catalyseur sur les deux personnages principaux de façon différentes est complexe et ne saurait être caricaturé ainsi.

Ce qu'il y a d'intéressant avec Furie c'est qu'il est met le doigt sur les points sensibles et clivants de notre société : propriété, libre arbitre et conditionnement, sexualité, racisme, les marges, la famille, les amis, etc. Les thèmes soulevés sont intéressants. Seulement, j'ai cette impression que les auteurs ont voulu aborder trop de sujets en filigrane sans vraiment arriver à les traiter dans la totalité. Ainsi, après avoir évoqué pleins de choses, on repart avec pas grand chose.

Olivier Abbou nous offre un dernier tiers graphiquement génial et formidablement mis en scène.

La séquence de la piscine est de toute beauté et de façon générale ce passage semble tout droit sorti d'Hotline Miami.

Toutefois, je suis déçu que l'action cède à la réflexion tant les questionnements soulevés lors du développement de l'intrigue étaient intéressants. Car au fond, nous imaginons tous très bien l'avenir qui sera réservé à cette baraque. Le voyage du héros en lui-même et sa transformation sont plus captivants que de quelques coups poings.

Je suis content que ce film ait pu exister mais comme nul n'est prophète dans son pays, je doute qu'il aura l'accueil qu'il mérite. Cependant, avec un pitch et un titre à l'international comme GET IN, je suis sûr qu'il trouvera son public ailleurs. Il a déjà un (petit) distributeur qu'il le soutient, c'est déjà ça.

Faites attention en rentrant chez vous.

Alcalin
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le 9 sept. 2019

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Alcalin

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