Le film commençait très bien par le générique sur fond d'adagio d'Albinoni et mettait bien en condition le spectateur qui savait que le film était un film sur la guerre des tranchées en 1915, fussent-elles dans les Dardanelles. Sujet historique passionnant. En tous cas, pour moi.
En plus, le spectateur (que je suis), conditionné par de superbes critiques sur SC, plutôt fan de Peter Weir (Truman Show, Witness, cercle des poètes, les chemins de la liberté, etc …), se préparait à voir un superbe film antimilitariste ou anti-guerre.
Eh bien, le spectateur (que je suis encore et toujours) s'est farci 1 h 20 (à peu près, pas vérifié exactement) de scènes de courses de sprint officielles ou dans le bush, pieds nus (ça se passe en Australie occidentale), d'un instant de lecture (émouvant certes) du livre de la jungle, pour apprendre que le jeune sprinteur veut courir l'aventure et faire la guerre en Europe. Après tout, pourquoi pas ! Que la motivation principale soit que les filles deviennent folles à la vue d'un uniforme (de la cavalerie légère) ne me dérange guère. Car il faut bien avouer que la conscience politique de cette affaire chez ces jeunes se résume à peu de choses. Les turcs sont alliés des allemands qui sont contre les anglais. Ah mais non, on ne va pas soutenir les anglais que nous avons combattu il n'y a pas si longtemps. Oui, mais quand même les allemands sont pires et les turcs font des choses pas loyales. Donc, il faut y aller.
En bref, au bout d'une heure 20, d'errances diverses et variées (traversée à pied du désert, entrainement en Egypte et pour certains, dépucelage en règle par les putes de la Casbah locale au pied des pyramides (ouf, Weir nous épargne toutefois les détails), nous voilà prêts à rencontrer et battre à plate couture ces salauds de turcs. Il nous reste un peu moins de 20 minutes pour assister à un assaut suicidaire sur des lignes ennemies fortement équipées de mitrailleuses contre lesquelles les baïonnettes au canon ont encore moins d'efficacité que les arcs et les flèches des indiens du Far-Ouest.
Donc oui, les vingt dernières minutes sont tragiques et bouleversantes. En effet, tout ça (les 1 h 20 de rigolades, aventures et blagues potaches) pour en arriver à se faire tuer dès le premier assaut ne rend pas la guerre très sympathique. C'est certain.
En conclusion, nous dirons que je me sens volé sur la marchandise : ce n'est pas vraiment un film sur la conduite atroce de la guerre par des officiers d'opérette incompétents, c'est un film sur l'amitié de deux sprinteurs qui voulaient vivre une belle aventure hors de leur bush natal (pour, je suppose, avoir de belles médailles) qui se termine tragiquement dès leur entrée en lice au front ; l'aventure se termine tragiquement à cause de la bêtise d'un colonel qui n'écoute que son orgueil et qui n'est même pas soutenu par le général, son chef. Sur ce coup-là. On ne peut, cependant, tirer aucune conclusion sur la conduite de cette guerre dans les Dardanelles en particulier. Tout juste, que la guerre n'est qu'une aventure que pour ceux qui survivent. Pour ça, le film est assez démonstratif.
La note, je la mets à 5 à cause de l'adagio d'Albinoni et des vingt minutes finales qui sont plutôt bien réalisées.