D'aucuns ont comparé ce film français à la filmographie de Wes Anderson (Moonrise Kingdom, À bord du Darjeeling limited, The grand Budapest hotel...) pour son ambiance onirique et coloriée à la limite de l'absurdie. Il y a effectivement quelques points communs, comme dans les rebondissements inattendus et qui peuvent paraître, de prime abord, loufoque voire à côté de la plaque. Là, on peut voir les différences entre les cinémas anglo-saxon et français, les uns sont plus rodés dans le conte, le fantastique ou le merveilleux, les autres sont traditionnellement plus basés sur les dialogues et les relations humaines. Gaspard va au mariage réussit un très bon alliage des deux.
Entre les rebondissements qui rythment le film et rivent le spectateur au récit, on a en effet droit à des dialogues écrits et surtout à des personnages incarnés qui ont chacun l'air d'orbiter autour de leur propre planète, bien que constituant tout de même une famille nombreuse, hommes et animaux confondus. C'est à ça que tient la réussite de ce film : il réussit à laisser chaque acteur (Lætitia Dosch, Félix Moati et Christa Theret mais surtout Johan Heldenbergh dans le rôle du père) exploiter le grain de folie inhérent à leur personnalité sans jamais tomber vraiment dans le n'importe quoi.
Mais à la différence de films comme Ma Loute ou La fille du 14 juillet, qui exploitent aussi ce grain de folie, Gaspard va au mariage n'est finalement pas une comédie, ou en tous cas pas une comédie théâtrale, exagérée. C'est plus une tranche de vie espiègle et légèrement mélancolique, un peu dans le genre d'Amélie Poulain. C'est un film qui célèbre l'authentique, la spontanéité. La nudité y est naturelle, le sexe y est ludique. Ils ont tous plus ou moins du mal à tirer un trait sur leur âme d'enfant. Malgré tout, les personnages ne sont pas tombés de la dernière pluie, ils ont une histoire, un passé voire un fardeau qu'on entrevoit par moment.
Bien sûr, il ne faut pas oublier l'importance de l'environnement : un grand parc zoologique aux animaux exotiques et un superbe grand manoir aux grandes pièces et meubles rustiques. L'environnement, à l'instar du jeu des acteurs, nous place constamment dans le rôle d'enfants curieux, mais néanmoins conscients que toutes choses ont une fin, conscients du tragique de l'existence. Le scénario met par exemple en exergue le fait que les zoos appartiennent désormais au passé, que les gens n'y voit plus que des animaux en cage, qu'ils ont oubliés en quoi le circuit du zoo racontait une histoire. La famille de loufetingues qui nous est présentée, est promise à la désunion : chacun fera son chemin de son côté. C'est à ce moment de l'histoire, où sa morale est clairement développée, qu'on ressent les liens qui unissent indéfectiblement les membres uniques de cette famille déjantée, dans le legs de souvenir et de valeurs qu'elle partage.
On arrive clairement à un film marquant, qui allie un scénario très travaillé, un décor enchanteur, des personnages authentiques et un message universel. Superbe !