C'est beau mais c'est loin
Vers 2/3 du film Luchini déclare, parlant de Mme Bovary (le livre) : "Il ne se passe rien, mais en même temps on s’intéresse".
En effet, il ne se passe pas grand chose, du moins en apparence. Plus qu'une adaptation du livre, il s'agit surtout d'une mise en abîme particulièrement bien menée. Evidemment, Luchini est très bon comme toujours et Gemma Arterton est tout à fait torride avec son physique de pinup.
La plus grande réussite du film est à mon sens le décalage progressif entre le cadre dans lequel évoluent les personnages, toujours magnifiques, et les rapports humains, de plus en plus malsains. D'un coté, on a des décors champêtres de toute beauté, magnifiés par une maîtrise de la lumière qui impose le respect. Tout brille, la forêt est belle, le village pittoresque, la boulangerie scintille et sent bon le pain chaud (et ce, tout au long du film). Et, comme des allumettes qu'on approcherait trop d'un feu, les âmes des personnages, lisses et immaculées au début, se brûlent au contact de Gemma Bovary, se tordent et noircissent pour devenir des reflets hideux de ce qu'elles étaient. C'est là d'ailleurs que le couple Luchini/Fontaine offre du génie : la métamorphose qui s'opère chez Martin (Luchini), faisant d'un gentil fou un voyeur manipulateur et dangereux est filmée et jouée avec tant de finesse dans sa progression qu'on la voit à peine se produire, et pourtant elle est radicale.
D'ailleurs, je trouve que ce film a énormément de points communs avec "Dans la maison" de Ozon, où Luchini jouait déjà un rôle assez similaire.
Bref, c'est du très bon cinéma.