Dans l’imaginaire collectif lambda, le cinéma d’animation est souvent considéré comme un art destiné seulement aux enfants. Une idée reçue qui a la vie dure et dont certains artistes font tout pour transformer cet a priori, en démontrant que l’ont peut faire des films d’animations complexes. Mamoru Oshii est l’un d’eux. Au même titre que Katsuhiro Ōtomo avec Akira, Mamoru Oshii se lance donc dans l’adaptation d’un manga seinen cyberpunk avec Ghost in the Shell du mangaka Masamune Shirow. Le rapport à l’œuvre initial qu’entretien Mamoru Oshii, ainsi que la teneur philosophique du propos, n’est d’ailleurs pas sans rappeler la relation entre Ridley Scott et son adaptation du livre de Philip K. Dick, Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?, nommé Blade Runner à l’écran. A savoir, un profond respect pour l’œuvre, en transposant idéalement sa richesse esthétique et toute sa complexité. Car bien que son synopsis évoque plutôt un thriller d’action classique, Ghost in the Shell est en réalité un opéra métaphysique et philosophique, qui dès les premières minutes d’ouverture et le sublime score de Kenji Kawai, nous met dans les conditions idéales pour ouvrir notre esprit de réflexion et assister à une œuvre visionnaire majeure du cinéma d’animation.
Proposant à la fois des séquences d’actions percutantes et des séquences introspectives, Mamoru Oshii fait preuve d’une maîtrise totale dans toutes les formes de sa narration, que ce soit dans le ton comme les différents rythmes qu’un cinéma aussi exigeant que celui-ci impose. D’autant que l’aspect purement technique de Ghost in the shell fusionne parfaitement l’animation traditionnelle 2D et la technologie 3D encore en plein balbutiement. Bien que ses thèmes soient des classiques de la science-fiction, la force de Ghost in the shell se retrouve dans ces questionnements qui sont abordés, à la fois visionnaire mais pourtant si proche de nous. Qu’est-ce qu’être humain ? Pourquoi l’humain, en tant que Prométhée moderne cherche t-il constamment à créer la vie ? Y a-t-il une différence entre l’humain et le robot doté de conscience et de sensibilité ? Quelle est la place du cyborg dans l’ordre naturel établi ? Y a-t-il une frontière entre le corps et l’esprit ? Mais surtout qu’elle serait le combat d’un cyborg afin de s’affirmer, de vivre puis d’évoluer à son tour ? Vous avez quatre heures !