Présenté en avant première au Festival de Gérardmer 2018, Ghostland a frappé fort. Autant pour les mesures anti-piratage mises en place pendant la séance que pour la qualité nerveuse de l'histoire. Grand Prix pour l'occasion, je dois avouer que le dernier film de Pascal Laugier m'a bien botté le derrière.
Sans spoiler, je peux vous dire que Ghostland torgnole. Il vous giffle, vous malmène, vous chamboule.
L'histoire est simple, mais portée autant par une excellente caractérisation des personnages que par une mise en scène maline, saupoudrée d'effets spéciaux d'une qualité bluffante.
On navigue toujours entre folie et fantastique, avec une adresse que je n'avait pas revue depuis l'excellent Babadook, de Jennifer Kent.
On retrouve la même finesse, avec peut être plus de candeur dans Ghostland, qui vous détache suffisamment des personnages pour vous donner l'impression étrange que chacune est factice.
Il y a toujours une note latente de malaise, que ce soit dans les actions des deux soeurs, victimes il faut le rappeler d'un enlèvement et de violences particulièrement odieuses.
Ce malaise est distillé brutalement, à grands renforts de détails.
La photographie, d'abord sombre, puis de plus en plus glauque, les Jump Scares savamment disséminés ou encore les twists, toujours brutaux et inattendus.
Pour être plus clair, le film a des fulgurances d'une violence très crue et montrée frontalement. Un effet accentué par les cadrages statiques, enfin de retour dans ce genre de productions.
Mais le plus stressant pour le spectateur réside dans la violence psychologique, savamment distillée puis entretenue avec soin tout au long de la narration.
Chaque temps fort marque une étape de plus dans le désespoir des deux héroînes, et on souffre avec elles.
Impossible de parler des particularités de la narration sans vous ôter le plaisir de la découverte, mais disons seulement que j'ai adoré les prises de risques de Pascal Laugier sur ce coup là.
On n'est plus seulement dans un thriller fantastique, mais dans un huis clos brutal et étouffant, techniquement très abouti; mais plutôt déroutant pour les spectateurs qui s'attendent à un énième film sur le sujet.
La performance des acteurs est à mon sens honorable, mais j'ai bien aimé celle de Mylène Farmer, toute en douceur et en retenue. Elle souligne le seul lien d'humanité qui restera pour les deux jeunes filles, et décuplera plus tard leur désespoir.
Les scènes d'actions, souvent courtes mais très intenses, donnent une vraie leçon de savoir-faire; et ça me fait vraiment plaisir de constater que la France a encore des gens talentueux dans le domaine du cinéma de Genre, tant décrié depuis ces dernières années.
A croire que Grave en aura été le révélateur.
Dernier point:
Pour moi le Slasher est un genre ultra stéréotypé, qui dénonce surtout des comportements globaux comme les excès de la Société de consommation, les clivages entre jeunesse dorée / jeunesse défavorisée, comportements Racistes ou misogynes...
Les codes sont simples et presque intemporels, ce qui favorise la transposition quelle que soit la culture.
On joue donc souvent à fond la carte du jusqu'au-boutisme pour permettre une lecture plus facile de ces travers sociaux, et on frissonne autant qu'on peut rigoler en fonction de sa propre sensibilité.
C'est en tout cas ce qu'on peut facilement ressortir de Black Christmas, Halloween, Vendredi 13 ou Scream.
Mais Ghostland propose une seconde lecture beaucoup plus fine, en tout cas plus moderne; où le jeu avec le spectateur porte autant sur le côté fantastique que sur le classicisme du genre, sans jamais tomber dans les travers de l'un ou de l'autre.
Le résultat est hybride mais vraiment excellent, car le résultat final en fait presque une curiosité de ce point de vue.
Je vous conseille donc Ghostland sans réserve, autant pour l'ingéniosité de sa mise en scène que pour son extrême nervosité. On y découvre une vraie pépite, espérée depuis trop longtemps, mais surtout un vrai bon moment de cinéma de genre FRANÇAIS.
Youpi.