Depuis la déception de "Year of the Horse", on sait malheureusement que le talent de documentariste de l'excellent Jim Jarmusch est loin d'égaler sa passion pour la musique, et pour le Rock en particulier.
Ce soporifique "Gimme Danger", hommage empêtré et superficiel à la carrière fulgurante de l'un des groupes les plus essentiels de la musique du XXè siècle, s'avère encore nettement pire, malgré notre propre admiration pour la trajectoire et l'intelligence de James Osterberg, aka Iggy Pop. Si c'est toujours un plaisir de regarder et écouter l'Iguane raconter ses histoires, le moins que l'on puisse dire, c'est que Jarmusch, sans doute trop fan transi, ou alors trop ami proche d'Iggy, ne pousse jamais les curseurs vers les sujets qui pourraient vraiment s'avérer passionnants : la manière dont la rébellion gauchiste (le MC5, John Sinclair) fut laminée, les tensions avec John Cale producteur du premier album, la relation entre Iggy et Bowie et l'enregistrement de "Raw Power", la relégation des frères Asheton au rang de seconds couteaux suite à l'irruption de James Williamson, etc.
Finalement, "Gimme Danger" est tout sauf dangereux, et reste éminemment poli et gentil, évitant donc lâchement son sujet en reléguant la catastrophe industrielle que fut la carrière de ce groupe qui laissa pourtant derrière lui trois albums incandescents au rang d'une anecdote sans importance particulière. Mais le pire est sans doute l'indigence formelle, indigne de Jarmusch, d'un film illustrant, faute de suffisamment d'archives filmées et photographiques, les propos des protagonistes de manière littérale à l'aide d'un bric-à-brac absurde d'images ridicules. Une véritable trahison de "l'esprit Stooges", donc !
[Critique écrite en 2018]