Gladiator II
5.5
Gladiator II

Film de Ridley Scott (2024)

La première génération crée, la seconde détruit

Il aura fallu que je paie 14€ (le seum c'est cher) pour répondre à plusieurs questions dont je connaissait déjà la réponse :


Gladiator avait-il besoin d'une suite ? NON.

Le chef d'oeuvre de l'année 2000, (que j'ai noté 10) est un des meilleurs films de l'histoire. Ce film est parfait parce qu'il est simple : Il développe une histoire de vengeance entre deux faux frères, héritiers de la succession d'un empereur. C'est une tragédie brillante avec deux acteurs au sommet de leur art. Il est parfait parce qu'au delà de l'action, il s'octroie des moments de pause, qui sont aussi des moments de grâce (la musique). Il est parfait parce qu'il a une fin. Parce qu'il n'y a plus rien à dire une fois la vengeance accomplie.


Un film s'appelant "Gladiator 2" allait forcément pâtir de la comparaison avec la perfection de son aîné. Il est impossible ici de ne pas jouer le jeu des différences, surtout quand Ridley Scott décide de reprendre la même structure narrative et donc de ne rien raconter de nouveau.


Ridley Scott est-il un bon réalisateur ? NON.

Je dis "est" et pas était, ou est devenu. Depuis la disparition de son frère en 2012, c'est la débandade, et c'est à se demander quelle était son implication dans les grands classiques de ce petit frère au génie questionné. Aucun plan dans Gladiator 2 n'est réussi. Rien dans la construction du récit ou la caractérisation des personnages ne permet de comprendre ce que ce film veut raconter. Pire que tout, après cette ouverture animée voulant convoquer l'héroïsme du premier film comme on déterre un vieux cadavre, jamais on ne ressentira de vrai souffle épique. Malgré plusieurs tentatives d'hommage (surtout à la fin), on a trop l'impression de voir un mec pisser sur sa propre tombe. Peut être parce qu'il ne peut plus se retenir ?


Paul Mescal a t'il les épaules pour remplacer Russel Crowe ? NON.

Paul Mescal, comme tout le cast, n'est pas aidé par un scénario qui ne sait quoi raconter. L'introduction échoue à le présenter comme un meneur d'hommes (Il perd le combat que Maximus gagnait), et le coeur du film met à mal sa quête de vengeance en changeant par trois fois sa cible : d'abord Rome tout entière, puis le général Pedro Pascal, enfin le félon Denzel Washington. Maximus n'avait qu'un objectif : la vengeance, dirigée vers Commode. Au fur et à mesure du film on le sentait se rapprocher lentement de ce but inéluctable. La quête de vengeance du deuxième opus n'ayant pas de cible, elle n'a pas de sens.


Transformer la femme au foyer du Maximus de 2000 en guerrière (on est en 2024) est un mauvais choix qui légitime sa mort au combat (on est loin de l'injustice de la crucifixion). Anonymiser son meurtrier, faire du général un humaniste sont autant de choix narratifs qui rendent difficile de croire à la "rage" qui habite Paul Mescal tout le film, tant elle souffre la comparaison de celle de son illustre père. Quand il se met en plus à changer d'avis, par exemple avec sa mère, on ne comprend plus rien.


Parler des discours de général de guerre qui n'ont aucun sens ni charisme me mène à critiquer plus largement l'écriture des dialogues de ce film, qui souffrent terriblement de la comparaison avec les punchlines de son aîné.


La bande annonce étant moche, le film va t'il être dégueulasse ? OUI.

Loin de la chaleur âpre du Colisée asséché des années 2000, le déluge d'effets spéciaux et la volonté d'en faire toujours plus mènent à plusieurs scènes d'action étonnamment insipides. Trop nombreuses mais aussi trop courtes, surtout trop moches et trop mal chorégraphiées, elles ne maltraitent jamais assez le héros et ne sont jamais crédibles. Beaucoup d'argent dépensé pour que personne ne transpire dans la salle, c'est dommage.


C'est la plus grande critique que je puisse faire au film : on ne ressent jamais le souffle épique. La grandiloquence des scènes d'action ne suffit pas à déterrer le cadavre de Maximus, le choix sortir de l'arène et de s'intéresser à la politique pèse pour un film d'action, et pourtant c'est la meilleure partie du film.


Va t'on amener les thématiques de 2024 à la testostérone de l'antiquité ? OUI.

S'il y a bien un personnage qui sort du lot, c'est celui joué par Denzel Washington. Vicieux et arriviste, il gravit les échelons, seul et en moins de deux heures de film. Certains trouveront qu'il est excellent, j'ai plutôt tiqué sur la facilité du scénario et l'absence totale de tragédie. Plus intéressant est la bataille philosophique autour de la chute d'une civilisation qui se trame autour de son personnage. Nihiliste, il souhaite l'accélérer et prendre le plus de profits. De l'autre côté les dirigeants fous attisent la colère du peuple, pendant que le général humaniste veut redonner le pouvoir au sénat. Enfin, Lucius crée l'insurrection et récupère le pouvoir par la rue et le peuple. Des oppositions somme toutes très modernes et à la morale un peu dégueulasse venant d'un réalisateur américain.


En conclusion : un film dans lequel il n'y a pas grand chose à sauver, des erreurs narratives trop importantes, des effets spéciaux discutables et un projet qui n'aurait pas du voir le jour.




Jb_tolsa
4
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le 18 nov. 2024

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Jb_tolsa

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