On vit dans un drôle de monde. Il y a moins d'un an, le phénomène Barbenheimer propulsait deux films aux antipodes comme un joli rappel de la nature flexible et universel du plaisir en salles. Et là ,en trois mois, on pousse le bouchon un cran plus loin avec le même personnage (en tout cas même nom) - Godzilla - catapulté dans deux longs-métrages qu'on ne pourrait imagiger plus opposés. Tandis que Minus One retournait aux origines du monstre radioactif pour sonder le trauma nucléaire et familial,Godzilla x Kong - Le nouvel Empire achève d'en faire le simple joujou d'un blockbuster sans queue ni tête. Aussi stupide soit le précédent opus, c'était une ligne claire faite de rebondissements crétins et de personnages interchangeables. Et puis quoi, le plaisir de voir les deux titans se mettre sur la trogne était là. Aujourd'hui, ils peuvent enchainer les bourre-pifs sans qu'on esquisse de réactions. Parce que plus grand monde n'en a quelque chose à faire. Les bestioles n'ont plus grand chose à voir avec leur modèle d'origine. La mise en scène d'Adam Wingard n'intègre plus du tout les notions d'échelles. À peu de choses près, les colosses de 100 mètres sont filmés de la même manière qu'un humanoïde lambda. Rome ou Rio passent à la moulinette et on s'en fiche. Pour dire, l'un des premiers combats a lieu pendant le générique d'intro, vite fait mal fait. Visuellement, c'est inégal. Tant qu'on suit les bébêtes, c'est assez joli. Dès qu'on y intègre quelques humains, c'est déjà plus médiocre avec pas mal de flous à l'arrière-plan. Pendant qu'on en parle, les personnages humains du précédent, vous vous rappelez ? Pas grave, ils sont encore plus inintéressants ce coup-là. Rebecca Hall s'occupe de traduire les diverses (et très nombreuses) idioties du script et on a toujours le blogueur illuminé aux connaissances encyclopédiques...et aux vannes rassies. Ah oui, il y a aussi un dentiste pour monstres géants (Dan Stevens) parce que...bah parce que pourquoi pas ? Allez. Inutile de chercher à comprendre comment ou pourquoi comment telle chose arrive, elle arrive c'est comme ça. Avec un peu plus de cœur à l'ouvrage le lâcher-prise aurait pu être possible. Mais quand on parle d'une débauche de monstres, d'une orgie de destruction et que tout ce qu'on en retire c'est de l'ennui, c'est tout de même une sacrée débandade. Le cinéma va de l'avant, il continuera à faire cohabiter tout et son contraire d'une salle à l'autre. Tant qu'il avance, à nous de suivre.