Souvent considéré comme l'un des meilleurs, si ce n'est le plus réussi de la saga, revoir « Goldfinger » aujourd'hui me fait quelque peu tempérer ce statut d'incontournable. Pourtant, certains aspects parlent clairement en faveur de celui-ci : d'abord, son méchant ! Non seulement Gert Fröbe le joue fort bien, mais celui-ci a une vraie personnalité, avec des motivations parfois, certes, originales, mais toujours justifiées, son projet final ayant le mérite d'être pour le moins inhabituel, voire franchement séduisant.
De plus, le scénario n'hésite pas à être parfois cruel :
la mort de Jill Masterson et cette superbe idée de l'avoir transformée en « statue d'or », rejointe peu de temps après par sa sœur, tuée tout aussi brutalement.
Dans ces moments, on observe un James Bond impuissant, touché, vulnérable à plusieurs reprises (comme quoi, les méchants font TOUJOURS les même erreur : ne pas tuer le héros lorsqu'on en a l'occasion), ce qui le rend plus intéressant. Sans oublier toute cette période
d' « attente », aussi curieuse qu'inhabituelle, où 007 s'avère à la fois prisonnier et en très charmante compagnie, sorte d'otage de très grand luxe.
Le problème, c'est que les bons points accumulés sont mis à mal dans la dernière partie : alors que je faisais l'éloge précédemment d'un Bond presque gentleman, le voilà à nouveau terriblement phallocrate, tellement fort qu'il parvient à
faire passer dans l'autre camp une ennemie qu'il venait quasiment d'agresser sexuellement : pas de doute, se faire rouler une pelle par Sean Connery, ça vous change une femme...
Je sais que c'était une autre époque, mais quand même. Surtout, était-il vraiment indispensable de terminer
sur une énième fusillade avec explosions en tout genre, ayant un sérieux air de déjà vu où seul l'affrontement avec l'imposant Oddjob
permet de sortir de la monotonie, l'ultime affrontement avec Goldfinger (pourtant très réussie jusque-là, presque à fleurets mouchetés) se terminant presque en
pochade (Fröbe coincé dans le hublot par sa forte taille : vraiment?),
la sublime Honor Blackman ayant
définitivement succombé au charme de l'ami Sean...
Heureusement, celui-ci est toujours aussi impérial dans le rôle, et il serait injuste de se focaliser uniquement sur ce dernier tiers au vu des réussites évoqués précédemment : n'empêche, celui-ci laisse clairement un goût amer, empêchant ce numéro trois d'être le volet de référence souvent décrit et qu'il aurait pu, dû être s'il avait maintenu ses belles ambitions, scénaristiques comme « morales » jusqu'au bout : vraiment dommage.