À l'instar de David Bowie déclarant ne pas faire du rock mais s'en servir, Peter Greenaway utilise le cinéma comme un excipient. Architectural et graphique, son principe actif baroque et bavard prend ici la forme d'un livre d'images foisonnant.

C'est précisément le sujet de Goltzius et la Compagnie du Pélican : un projet de livre illustré qui donne naissance à une succession de saynètes évoquant les contes érotiques de l'Ancien Testament. Destinées à convaincre le Marquis d'Alsace d'investir dans le projet, elles servent la métaphore proposée par Greenaway, les artistes d'un côté, le mécène de l'autre, le voyeurisme, l'art, le pouvoir, l'argent.

L'image est riche, multiple, infiniment travaillée. C'est de la dentelle, des superpositions de calques, des surimpressions, des cadres découpés, une organisation géométrique du cadre. Les jeux de symétrie sont souvent impressionnants, parfois grandioses.

L'érotisme est avant tout littéraire, fantasmé, intellectuel. Et si les corps des comédiens sont souvent nus, c'est une nudité blanche, froide, dépourvue d'épiderme et de chair. On parle de sexe, on simule des accouplements, une sodomie, une décapitation, mais sans désir. C'est l'idée du sexe et du péché mais sans le sexe.

On peut se laisser porter par la partition baroque de Greenaway ou décrocher complètement. C'est toute la singularité d'un cinéma qui tient davantage du théâtre et de la peinture, un cinéma détourné en quelque sorte. Quoi qu'on en pense, on ne pourra pas nier les multiples qualités formelles d'un film volontairement singulier.
pierreAfeu
6
Écrit par

Créée

le 25 sept. 2014

Critique lue 435 fois

2 j'aime

pierreAfeu

Écrit par

Critique lue 435 fois

2

D'autres avis sur Goltzius et la Compagnie du Pélican

Goltzius et la Compagnie du Pélican
pierreAfeu
6

Love on the beat

À l'instar de David Bowie déclarant ne pas faire du rock mais s'en servir, Peter Greenaway utilise le cinéma comme un excipient. Architectural et graphique, son principe actif baroque et bavard prend...

le 25 sept. 2014

2 j'aime

Goltzius et la Compagnie du Pélican
pilyen
6

Critique de Goltzius et la Compagnie du Pélican par pilyen

Par quel bout prendre ce nouvel opus de Peter Greenaway ? Difficile à dire car, depuis un petit moment, il essaie d'exploser le cinéma en un mélange de tous les arts possibles, la danse, la...

le 9 févr. 2014

2 j'aime

1

Goltzius et la Compagnie du Pélican
stebbins
5

L'invasion des maux barbares

Greenaway ou le profanateur de ces cultures... Cinéaste controversé, peintre de formation et doué d'une érudition artistique qu'il régurgite aisément au coeur de son Oeuvre Peter Greenaway s'est très...

le 12 déc. 2015

1 j'aime

Du même critique

Nocturama
pierreAfeu
4

The bling ring

La première partie est une chorégraphie muette, un ballet de croisements et de trajectoires, d'attentes, de placements. C'est brillant, habilement construit, presque abstrait. Puis les personnages se...

le 7 sept. 2016

51 j'aime

7

L'Inconnu du lac
pierreAfeu
9

Critique de L'Inconnu du lac par pierreAfeu

On mesure la richesse d'un film à sa manière de vivre en nous et d'y créer des résonances. D'apparence limpide, évident et simple comme la nature qui l'abrite, L'inconnu du lac se révèle beaucoup...

le 5 juin 2013

51 j'aime

16

La Crème de la crème
pierreAfeu
1

La gerbe de la gerbe

Le malaise est là dès les premières séquences. Et ce n'est pas parce que tous les personnages sont des connards. Ça, on le savait à l'avance. Des films sur des connards, on en a vus, des moyens, des...

le 14 avr. 2014

41 j'aime

21