Adaptant le romancier Pierre Véry, Jacques Becker signe une formidable chronique paysanne, qui sous ses sombres atours de drame rural teinté de polar, esquisse en filigrane le portrait de la France de Vichy, "Goupi mains rouges" étant sorti sous l'Occupation, en 1943.
Ce titre étrange renvoie à une pratique fréquente dans les campagnes en ces temps anciens : on désignait ainsi les membres d'une même famille, juxtaposant d'abord le patronyme, directement suivi d'un sobriquet relatif au caractère ou aux activités du lascar.
Cette France rurale éternelle "prend cher" dans la première partie du film, et on pourra simplement regretter que Jacques Becker finisse par adoucir son propos au fur et à mesure du récit.
Peut-être une forme d'auto-censure de la part du cinéaste parisien, même si "Le corbeau" de Clouzot, beaucoup plus frontal dans sa charge, sortait dans les salles la même année...
Portée par une troupe de comédiens convaincants, au premier rang desquels figure évidemment l'inquiétant Fernand Ledoux, la galerie de portraits s'avère en tout cas fort savoureuse, relevée d'une intrigue intéressante, mystérieuse juste ce qu'il faut...